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Sortir dans les cabarets à Montréal (1940-1960)

09 septembre 2019

Pendant quelques décennies, cabarets, bars, clubs et cafés font partie du paysage montréalais. Locaux et touristes y assistent aux spectacles les plus variés, tandis que l’alcool coule à flots.

Bellevue Casino

Photographie en noir et blanc d’un groupe de femmes en costume de scène qui dansent. Il y a une vue sur la salle.
Bibliothèque et Archives Canada. e005477036.
Petit Las Vegas, Chicago ou Paris d’Amérique du Nord… Montréal a eu plusieurs surnoms au cours des années 1940 et 1950. Tous démontrent son caractère de ville ouverte aux plaisirs et à la vie nocturne, qui ne se dément toujours pas. Montréal acquiert cette réputation au début de la prohibition aux États-Unis qui incite touristes et artistes à venir au nord de la frontière, là où l’alcool est permis. L’âge d’or des cabarets prend fin avec les vagues de réformes qui secouent Montréal, mais aussi à cause de l’avènement des téléviseurs et de l’exode en banlieue.

Néanmoins, pendant ces quelques décennies, les cabarets, bars, clubs et cafés font intrinsèquement partie du paysage de la métropole. Montréalais et touristes vont de l’un à l’autre à la recherche des divertissements les plus variés. Deux croisements sont névralgiques pour quiconque souhaite sortir prendre un verre et voir un spectacle : l’intersection entre le boulevard Saint-Laurent et la rue Sainte-Catherine et l’angle des rues Saint-Antoine (autrefois Craig) et de la Montagne, surnommé « The Corner ». Alors que la première intersection est surtout associée aux cabarets, la seconde est plutôt reconnue pour ses airs de jazz, elle accueille en effet le Rockhead’s Paradise et le Café St-Michel. Les fêtards ont la possibilité de voir de grandes vedettes américaines et européennes présenter des numéros endiablés sur les différentes scènes de la ville. Par sa position géographique, Montréal profite d’influences extérieures amenant de nouvelles sonorités qui inspirent les artistes québécois en émergence.

Les spectacles

Contrebassiste

Photographie en noir et blanc d’un homme noir jouant de la contrebasse sur une scène.
Archives de la Ville de Montréal. VM94, SY, SS1, SSS14, S1-052.
« I was the novelty act ‘cause I tapped, danced and I sang. I guess I was the Beyoncé of that era! » [« J’étais la nouvelle attraction parce que je faisais des claquettes, je dansais et je chantais. Je crois que j’étais la Beyoncé de l’époque! »], s’exclame Ethel Bruneau, artiste multidisciplinaire. Son affirmation illustre la diversité des numéros auxquels les spectateurs peuvent alors assister. Outre les performances de danseuses, les cabarets offrent également de l’animation. À Montréal, à cette époque, tout le monde connaît Jacques Normand, le maître de cérémonie par excellence, mais aussi Armand Larrivée Monroe qui anime des soirées dans les clubs davantage destinés à une clientèle homosexuelle. On trouve, bien entendu, dans ces établissements une piste de danse et des musiciens. Dans certains bars, comme au Café St-Jacques, il est possible pour un homme de communiquer par téléphone avec les charmantes jeunes femmes venues séparément afin de les inviter à danser.

Montréal, là où l’alcool coule à flots

Chez Maurice

Photographie en noir et blanc d’un orchestre en train de jouer.
Centre d’histoire de Montréal, Fonds Billy Georgette.
Alors que le reste de l’Amérique du Nord est à sec, la métropole québécoise ouvre ses portes à la bière, aux spiritueux, mais aussi aux cocktails sucrés tels le Zombie et le Singapore Sling. Dans les bars, les swizzles sticks [bâtonnets à cocktail] servent à compter combien de boissons ont été vendues. Chaque club ou cabaret a le sien avec un symbole qui le représente. Ces objets ont donc, tout comme les cartons d’allumettes, un rôle publicitaire en plus de leur fonction de base.

Grâce à son port, porte d’entrée sur le continent, Montréal est une plaque tournante du commerce illégal de l’alcool (et de la drogue). Plusieurs criminels d’envergure sont d’ailleurs propriétaires d’établissements de divertissement qu’ils utilisent, notamment, pour le blanchiment d’argent ou comme lieu de rencontre pour les affaires ou les règlements de comptes. C’est le cas de Vic Cotroni qui possède le Faisan Doré ou encore Harry Ship qui a Chez Paree dans ses actifs.

Sortir à Montréal au milieu du XXe siècle est donc une expérience exaltante, parfois risquée, sous la lumière des néons. Ceux-ci vont s’éteindre notamment à cause de la grogne réformiste qui se fait de plus en plus présente, avec à sa tête un duo bien connu : Pacifique « Pax » Plante et Jean Drapeau.

Références bibliographiques

BOURASSA, André, et Jean-Marc LARUE. Les nuits de la Main : Cent ans de spectacles sur le boulevard St-Laurent (1891-1991), Montréal, Éditions VLB, 1993, 368 p.

CHARLEBOIS, Catherine, et Mathieu LAPOINTE (dir.). Scandale! Le Montréal illicite 1940-1960, Montréal, Cardinal, 2016, 272 p.

MARELLI, Nancy. Stepping Out. The Golden Age of Montreal Night Clubs 1925-1955, Montréal, Véhicule Press, 2004, 144 p.

WEINTRAUB, William. City Unique: Montreal Days and Nights in the 1940s and ‘50s, Toronto, McClelland & Stewart, 1996, 332 p.