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Jean Drapeau

14 janvier 2016

Homme d’envergure, Jean Drapeau a décroché huit mandats à la mairie de Montréal et a lancé une série de grands projets qui ont transformé la ville. Il a cependant laissé un héritage controversé.

Né à Montréal dans le quartier Rosemont le 18 février 1916, Jean Drapeau grandit au sein d’une famille canadienne-française, conservatrice et religieuse. Il est le fils unique de Berthe Martineau et Joseph-Napoléon Drapeau, qui appartiennent à la classe moyenne. Son père est vendeur d’assurances, mais également conseiller municipal, ce qui influence le développement précoce d’ambitions politiques chez le futur maire.

Des débuts prometteurs

Jean Drapeau

Jean Drapeau marche sur ce qui deviendra l’autoroute Bonaventure. On voit la ville derrière lui.
Jean Drapeau, 1966. Magazine MacLean's.
Alors qu’il a été remarqué pour son élocution dès l’école primaire, le jeune homme étudie à l’Université de Montréal, qui lui décerne une licence en sciences sociales, économiques et politiques en 1937, puis, quelques années plus tard, un diplôme en droit. En 1943, il est reçu au barreau de Montréal où il amorce une brillante carrière qui le mettra bien souvent en porte-à-faux.

Au cours de la Seconde Guerre mondiale, Jean Drapeau s’illustre en menant une chaude lutte en tant que jeune candidat anticonscription (il est le « candidat des conscrits », opposé au major général Laflèche) dans Outremont, où il n’a aucune chance de l’emporter. À l’époque, il est proche de l’association des Jeunes Laurentiens, où militent de futurs membres du Comité de moralité publique. Ces jeunes nationalistes sont indignés par l’immoralité régnant à Montréal et au sein de l’armée, alors qu’on incite les jeunes Canadiens français à s’enrôler pour aller « défendre la chrétienté » en Europe.

Défenseur de la loi et de l’ordre

Jean Drapeau - victoire

Photo noir et blanc montrant trois hommes les bras en l'air en signe de victoire.
Archives de la Ville de Montréal. VM94,Z541-10.
Après la guerre, Drapeau continue de militer au sein du mouvement nationaliste tout en développant sa pratique d’avocat. Proche du Devoir, il est embauché par ce quotidien pour vérifier les faits exposés par Pacifique Plante dans sa série d’articles. Il aide ensuite ce dernier à constituer le gigantesque dossier d’accusations qui permettra d’obtenir l’enquête Caron. À partir de 1950, il s’illustre dans cette enquête qui met en cause de nombreux policiers ainsi que plusieurs élus municipaux accusés de corruption. À titre de procureur du Comité de moralité publique au sein de l’enquête Caron, avec Pacifique Plante, ce petit homme énergique se fait remarquer par la ténacité et le sang-froid avec lesquels il cuisine les témoins et les accusés, si puissants ou intimidants soient-ils. Jean Drapeau se pose en défenseur de la loi et de l’ordre.

Candidat à la mairie en octobre 1954, sous la bannière de la Ligue d’action civique, Drapeau l’emporte par plus de 50 000 voix contre son plus proche adversaire. Il est élu, à l’âge de 38 ans, avec près de 50 % des voix dans une course à neuf. Cette victoire décisive lance une longue carrière : il sera maire de Montréal pendant près de 30 ans, de 1954 à 1957, puis de 1960 à 1986. C’est à la veille de l’élection de 1960 qu’il fonde le Parti civique.

Huit mandats à la mairie

Élu pour la première fois en 1954, Jean Drapeau décroche huit mandats à la mairie de Montréal. Sarto Fournier lui ravit la fonction entre 1957 et 1960. Sachant bien s’entourer, Jean Drapeau nomme successivement au poste de président du comité exécutif quatre hommes dont les actions illustrent bien les changements qui s’opèrent dans son administration au fil des ans. Premier homme à occuper le fauteuil de président du comité exécutif sous Jean Drapeau, Pierre Des Marais est aussi préoccupé que le maire par la moralité publique, et ils entreprennent ensemble une réforme en profondeur des pratiques politiques à la Ville, sans y parvenir complètement. Lucien Saulnier, deuxième bras droit du maire, l’épaule dans ses réformes administratives et dans les grands projets des années 1960. C’est avec Gérard Niding, à partir de 1970, que Jean Drapeau prépare les Jeux olympiques et qu’il fait de plus en plus face à la critique pour les importants dépassements de coûts que cet événement occasionne. Enfin, Yvon Lamarre est président du comité exécutif pendant les dernières années de Jean Drapeau à la mairie. Conscients des critiques qu’ont suscitées les grands projets, Drapeau et Lamarre se concentrent sur l’aménagement des infrastructures locales.

Réalisations et critiques

Métro - inauguration première rame 1965

Inauguration de la première rame du métro à la Canadian Vickers, en présence notamment du cardinal Paul-Émile Léger, du maire Jean Drapeau et le président de la Commission de transport de Montréal, Lucien L'Allier.
Archives de la Ville de Montréal. VM94-Md19-006.
Pendant son passage à la mairie, Jean Drapeau est l’homme des grands projets. Dans les années 1960, il lance une série de projets d’envergure qui laissent leur marque. C’est pendant cette période que le maire Drapeau obtient la tenue de l’exposition universelle de 1967 à Montréal, qu’il réalise la construction du métro, qu’il contribue au développement immobilier du quartier des affaires et à la construction de la Place Ville Marie.

La tenue d’Expo 67 sur les îles Notre-Dame et Sainte-Hélène fait connaître la ville à travers le monde et permet au maire Drapeau d’accroître sa popularité auprès des Montréalais. Le déficit qui résulte de l’événement est toutefois vivement critiqué. L’obtention des Jeux olympiques, en mai 1970, suscite l’enthousiasme chez certains et l’inquiétude chez d’autres. Cherchant à rassurer les sceptiques, le maire Drapeau promet qu’il n’y aura aucun dépassement de coûts et que l’événement rapportera un important profit. Les Jeux olympiques organisés à Montréal en 1976 font briller la ville sur la scène internationale, une fois de plus. L’important déficit qui en découle apporte un dur coup à la popularité du maire Drapeau, qui ne se représente pas à l’élection de 1986.

Adoré par certains, détesté par d’autres, Jean Drapeau est reconnu pour son engagement au service des Montréalais pendant ses 29 années à la mairie.

Références bibliographiques

ARCHIVES DE MONTRÉAL. « Jean Drapeau », [En ligne], La démocratie à Montréal, de 1830 à nos jours. [http://www2.ville.montreal.qc.ca/archives/democratie/democratie_fr/expo/... (Consulté le 8 décembre 2015).

GIGNAC Benoît. Le maire qui rêvait sa ville : Jean Drapeau, Montréal, Éditions La Presse, 2009, 296 p.

MARSOLAIS, Claude-V., Luc DESROCHERS et Robert COMEAU. Histoire des maires de Montréal, Montréal, VLB éditeurs, 1993, p. 267-268.