Dans le contexte d’industrialisation, de croissance démographique et d’urbanisation du tournant du 20e siècle, le parc du Mont-Royal constitue un milieu naturel de qualité pour profiter de l’air pur et pratiquer plusieurs sports. L’escarpement sur le flanc sud offre quant à lui un point de vue exceptionnel sur la ville; une terrasse d’observation y est aménagée avant 1885. En 1906, à la demande de l’administration municipale, des pavillons d’été en bois sont bâtis selon les plans des architectes Marchand, Haskell et Maxwell. Désuets et exigus, ils sont remplacés en 1931 par l’actuel chalet du Mont-Royal construit dans le cadre du programme d’aide aux chômeurs mis en place lors de la Grande Dépression des années 1930. Le bâtiment est conçu par l’architecte Aristide Beaugrand-Champagne dont la carrière est marquée par plusieurs œuvres originales et fantaisistes. Le chalet du Mont-Royal demeure l’une des œuvres majeures de ce concepteur de renom.
Ouvert à l’année, le nouveau chalet est plus vaste et fréquenté, et ce, encore de nos jours, autant par les promeneurs pendant l’été que par les skieurs et les raquetteurs venant s’y réfugier durant l’hiver. Son volume horizontal est imposant grâce à sa grande toiture de tuiles rouges dont les débords saillants sont ornés de consoles en bois. L’architecture du chalet allie plusieurs styles. Alors que la façade principale possède une composition architecturale soignée, symétrique et rythmée d’influence Beaux-Arts, un style plus rustique d’inspiration Arts and Crafts se dégage de sa façade arrière qui prend l’allure d’un chalet alpin. Ses matériaux naturels, tels que la pierre et le bois, ainsi que ses nombreuses ouvertures assurent des liens importants avec le parc qui l’entoure. La majorité des caractéristiques architecturales extérieures du bâtiment (volumétrie, ordonnance de la façade, matériaux et ornementation) ont été conservées dans leur intégralité.
L’intérieur du chalet est des plus impressionnants avec sa grande salle des pas perdus dotée d’un plancher en marbre, d’un vaste foyer, d’éléments de mobilier de style Arts and Crafts, de grands lustres ainsi que d’un plafond rendant apparente sa charpente en bois de type Cruck. Les 17 tableaux ornant les murs du chalet, réalisés par des peintres de renom, rappellent des épisodes marquants de l’histoire de Montréal ainsi que l’évolution de la ville et de la montagne. Enfin, ce vaste espace intérieur s’ouvre sur une terrasse grâce à une série de portes-fenêtres munies d’impostes en forme d’anse de panier.
Les aménagements paysagers autour du chalet du Mont-Royal, qui s’inscrivent dans l’œuvre du grand architecte paysagiste Frederick Law Olmsted concepteur des plans du parc, sont d’une qualité exceptionnelle. Le cadre naturel environnant du parc met avantageusement en valeur l’édifice ainsi que le belvédère Kondiaronk. Cette grande place publique en hémicycle et son escalier majestueux mettent en scène le bâtiment tout en offrant le dégagement nécessaire à une vue incomparable sur le centre-ville de Montréal et le fleuve, favorisant ainsi une expérience sensorielle mémorable. Les chemins d’approche dont l’encadrement végétal accentue l’effet de dévoilement de la vue participent à ce lien unique entre la montagne et la ville, tout en laissant deviner la présence du chalet.
La contribution positive du chalet et du belvédère à la qualité paysagère du lieu et leur intégration harmonieuse, notamment par l’implantation, le volume et les caractéristiques architecturales du chalet, soutiennent la contemplation de la vue. Par ailleurs, le chalet constitue un point de repère exceptionnel au sein du site patrimonial du Mont-Royal et possède une valeur identitaire et symbolique incontestable pour les Montréalais et les touristes. On peut compter en 2015 près de cinq millions à le visiter annuellement, dont deux millions sur le belvédère Kondiaronk, pour y flâner et contempler la vue imprenable. En 2015, la valeur patrimoniale du chalet du Mont-Royal et du belvédère Kondiaronk a été reconnue à la suite du dépôt d’un énoncé de l’intérêt patrimonial qui repose sur les valeurs paysagère, historique, architecturale, artistique ainsi que sociale et symbolique du lieu.