Eau

Des formes multiples

Le mont Royal, né en partie de l’érosion des glaciers et de l’action de la mer de Champlain, sert de creuset à des sources, des étangs et des ruisseaux qui se modifient de siècle en siècle. Toutefois, comme d’autres Montérégiennes, il est généralement sec. Les pentes fortes qui le caractérisent et la composition poreuse de ses sols contribuent à créer cette particularité. De plus, la nature de la pierre en pourtour de la montagne favorise l’infiltration de l’eau. Celle-ci s’écoule entre les lits de roc et réapparaît sous forme de résurgences ou de sources intermittentes un peu partout sur la montagne. On peut imaginer qu’à l’origine les ruisseaux coulent librement sur le mont Royal.

Avec le temps, les gens tirent parti de la topographie et de l’écoulement des eaux pour créer des bassins : viviers, réservoirs d’eau potable, plans d’eau ornementaux. L’eau se manifeste sous forme de ruisseaux, d’étangs et de zone humide qui marquent surtout le paysage rural de l’entre-monts.

L’eau de la montagne est essentielle au développement de la ville. La construction de sept réservoirs d’eau potable, débutant avec le réservoir McTavish en 1856, suivi du réservoir du Haut niveau, permet le développement des quartiers et marque le paysage.

Dans le parc du Mont-Royal, le lac aux Castors est creusé à l’endroit où un lac avait été planifié (mais non réalisé) par Frederick Law Olmsted. Sa localisation correspond à celle choisie en 1858 pour la création d’un réservoir d’eau potable. Il se trouve à l’emplacement d’un ancien lac glaciaire devenu dépression lors du retrait de la mer de Champlain et est situé au point bas des bassins versants de la colline du Mont-Royal.

Dans les années 1940, la disparition de l’eau sur la montagne s’accélère. Les réservoirs, qui avaient à la fois une fonction utile et décorative, sont couverts pour des raisons d’hygiène et de sécurité.

Contrôler l'écoulement des eaux

Les ruisseaux et les étangs des cimetières disparaissent et, avec la construction de nouveaux chemins, les eaux sont canalisées dans les égouts de la ville. Plus tard, on procède dans le parc du Mont-Royal à un nettoyage des sous-bois pour améliorer la visibilité dans la forêt et ainsi mieux contrôler certaines activités à caractère sexuel jugées indésirables. À la suite de ces « coupes de la moralité », effectuées dans les années 1950, les eaux de ruissellement provoquent une succession de problèmes d’érosion et de ravinements profonds. La construction d’une digue et d’un bassin de rétention près du chalet du Mont-Royal est une mesure compensatoire qui permet la création d’une zone humide dont la valeur écologique et la grande biodiversité sont très appréciées aujourd’hui.

L’eau de ruissellement suit un parcours défini par la topographie qui découpe des bassins et des sous-bassins versants. À partir de la ligne de crête, l’eau de ruissellement est dirigée vers l’entre-monts (intérieur) ou vers la ville (par les versants extérieurs). L’eau percole dans le sol ou descend de la montagne en empruntant des rigoles, des fossés, des caniveaux et des ruisseaux vers et par des coulées et des points bas. Les coulées de l’entre-monts passent par les seuils, vers le piémont puis vers le fleuve. Les lignes de partage des eaux correspondent aussi à un découpage dans le paysage et délimitent les grandes unités topographiques.

Portrait actuel

Aujourd’hui, on retrouve plusieurs traces et témoins de l’histoire de l’eau, dont le bassin sur le site du Grand Séminaire (alimenté autrefois par les sources de la montagne), le ruisseau Springgrove, le réseau hydrographique et le lac aux Castors dans le parc du Mont-Royal.

La nature de l’eau surprend toujours par ses résurgences au travers des failles de parois rocheuses qui, avec le froid, créent d’étonnantes œuvres de glace éphémères.

L’eau, jadis canalisée vers les égouts, réapparaît aujourd’hui dans le parc à l’endroit des fossés, caniveaux, étangs et cascades, en respect des objectifs de mise en valeur du parc du Mont-Royal. 

Cinq réservoirs couverts et toujours fonctionnels témoignent de l’importance de la montagne comme point central de distribution de l’eau dans la ville. Il s’agit des réservoirs de la Montagne, du Sommet, de Côte-des-Neiges, Bellingham (aussi appelé Vincent-d’Indy) et McTavish. Le réservoir du Haut niveau, dans le parc du Mont-Royal, a laissé des traces discrètes dans le paysage par un replat maintenant planté d’arbres.

Au profit d’une lecture simplifiée, ce plan des bassins versants du mont Royal fait abstraction des interventions ayant modifié la topographie et, subséquemment, les trajets d’écoulement des eaux de surface. Il délimite les bassins versants et indique, de façon hypothétique, les trajets parcourus par les eaux de ruissellement. Ce regard nous permet de saisir, à l’échelle de la montagne, le découpage des grands bassins versants et leur relation avec la topographie de la montagne. La crête principale, ou ligne sommitale, définit les versants intérieurs et extérieurs de la montagne. Les seuils sont situés aux points de rencontre des versants de deux collines et marquent le lieu de passage entre l’intérieur et l’extérieur de la montagne.

Légende : Le ruisseau Springgrove coule toujours dans le cimetière Mont-Royal.
Credit : © Daniel Chartier, 2007

Traits dominants

  • La présence naturelle de l’eau, perceptible par une diversité de milieux humides (marais, étangs, coulées, ruisseaux intermittents) et par des résurgences dans les failles de parois rocheuses en hiver et au printemps.
  • Une présence essentielle dans différents espaces et ouvrages pour ses qualités d’ambiance, d’expérience paysagère et écologique.
  • La présence de composantes paysagères significatives témoignant de la domestication de l’eau dans l’histoire de la montagne.
  • Les vestiges des anciens ruisseaux : une partie du ruisseau Springgrove dans le cimetière Mont-Royal et une trace observable du ruisseau Raimbault dans le cimetière Notre-Dame-des-Neiges.
  • Le bassin du Grand Séminaire, alimenté autrefois par les sources de la montagne.
  • Le lac aux Castors, un bassin miroir unique situé au creux des bassins versants de la colline du Mont-Royal.
  • Les réservoirs, témoins du rôle de la montagne dans l’approvisionnement en eau potable et dans le développement de la ville

Consultez la version intégrale de la section Eau de l'Atlas du paysage du mont Royal.

Légende : « Montreal Mountain ». Ce plan ancien de Montréal montre les principaux ruisseaux tributaires de la topographie de la montagne : ruisseaux Springgrove, Burnside et Raimbault.
Source : Musée McCord, M9944.1
Credit : John Samuel McCord, vers 1850
Une paroi glacée au parc Rutherford. Photographie.