La communauté irlandaise est peu associée au Mile End. Pourtant, ce quartier lui doit un de ses imposants symboles, l’église St. Michael the Archangel, une des plus singulières de Montréal.
Église St. Michael the Archangel
La création d’une paroisse catholique anglophone dans le Mile End
Le village de Saint-Louis-du-Mile-End, devenu ville de Saint-Louis en 1895 puis annexé à Montréal en 1910, se transforme rapidement en banlieue urbaine. Il s’agit en fait d’une banlieue à deux visages : à l’ouest du boulevard Saint-Laurent, un quartier cossu et, à l’est, un quartier ouvrier et manufacturier. Mais, même pour les ouvriers, déménager vers ce qu’on appelait alors The North End est un signe d’ascension sociale. Il nous manque aujourd’hui des éléments pour expliquer l’installation d’une importante communauté irlandaise dans le Mile End. Les Irlandais étaient-ils suffisamment nombreux sur le territoire de ville Saint-Louis pour qu’une paroisse soit créée ou bien la paroisse a-t-elle été créée en vue d’inciter le déménagement d’une partie de la communauté dans des habitations neuves et plus salubres? Les deux hypothèses ont été émises. Nous savons qu’en 1902, une nouvelle paroisse catholique romaine irlandaise est fondée : la paroisse Saint-Michael’s. Jusque-là le territoire de la ville de Saint-Louis ne comportait qu’une paroisse catholique, celle de Saint-Enfant-Jésus du Mile End.Les offices destinés aux Irlandais ont d’abord lieu dans une salle au-dessus d’une caserne de pompiers au coin nord-ouest de la rue Saint-Denis et de l’avenue Laurier, dans l’édifice qui avait servi de maison municipale au village voisin de Côte-Saint-Louis avant son annexion à Montréal en 1893. Une première église est construite à l’intersection des rues Boucher et Drolet en 1904 ainsi qu’une école en 1907. Tous ces édifices ont aujourd’hui disparu, bien que le presbytère, au 5294, rue Saint-Denis, soit toujours là.
Cet emplacement s’avère peu pratique pour les Irlandais qui, signe d’ascension sociale, s’installent de plus en plus nombreux dans l’Annexe, c’est-à-dire l’ouest de la ville de Saint-Louis, et à Outremont. Par ailleurs, rapidement, les paroissiens se trouvent à l’étroit dans cette petite église. Sous l’impulsion du nouveau curé, l’énergique père Luke Callaghan, on décide de construire une église plus vaste sur un terrain resté vacant à l’angle des rues Saint-Urbain et Saint-Viateur. Elle est nommée St. Michael the Archangel. La paroisse prospère entre les deux guerres. Dans les années 1920, elle est considérée comme la plus importante paroisse catholique de langue anglaise au Québec. À partir des années 1960, comme de nombreuses autres communautés du Mile End, les habitants d’ascendance irlandaise quittent le secteur pour les nouvelles banlieues. La paroisse Saint-Michael’s décline. Aussi, à partir de 1964, elle partage l’église avec la mission polonaise Saint-Antoine-de-Padoue et devient en 1969 la Communauté catholique de St. Michael’s and St. Anthony’s. Aujourd’hui, les messes sont données en anglais et en polonais.
Une église au style architectural unique
Dôme église St. Michael the Archangel
Même si les paroissiens irlandais ne fréquentent plus depuis longtemps Saint-Michel-Archange, une statue de Saint-Patrick témoigne de l’identité originelle de la paroisse. Après la fusion de la paroisse avec la mission franciscaine polonaise Saint-Antoine de Padoue, saint François d’Assise et saint Maximilien Kolbe se sont joints au saint patron irlandais. En 1968, l’église accueille un nouveau saint : San Marziale. Il est le saint patron d’un petit village de Calabre, Isca sullo Ionio, dont est originaire une partie de la communauté italienne du Mile End, qui elle n’a pas d’église. Le premier dimanche du mois de juillet a lieu la fête de la San Marziale : le saint est mené en procession sur la rue Saint-Viateur. L’année suivante, l’église prend le nom de St. Michael’s and St. Anthony’s.
En raison de son histoire, de sa valeur symbolique, de son architecture et de sa décoration intérieure, le Conseil du patrimoine religieux du Québec a reconnu à l’église Saint-Michel et Saint-Antoine une valeur patrimoniale exceptionnelle, lui attribuant la cote B sur une échelle de A à F.
Cet article est un extrait du texte Église St. Michael the Archangel, rédigé en 2016 et accessible sur le site Internet de Mémoire du Mile End.
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