Deux belles tours rondes sur la rue Sherbrooke Ouest sont les derniers vestiges d’une grosse mission autochtone située sur le versant sud du mont Royal à la fin du XVIIe siècle.
Tours du fort de la montagne
Pour en comprendre l’origine, il faut se rappeler que les autorités coloniales de la Nouvelle-France avaient la volonté de convertir les Premières Nations et de les installer dans la vallée du Saint-Laurent en tant qu’alliés politiques. Cet effort débute dès 1637 à Sillery, près de Québec, et la même volonté anime la fondation de Montréal en 1642.
Une mission sur la montagne
Mais la région est aux prises avec la menace iroquoise et ce n’est qu’à partir des années 1660 qu’une première mission prendra naissance près de Montréal, soit celle de Saint-François-Xavier-du-Sault, à La Prairie. D’abord occupée par des Iroquois Oneïouts (Oneidas) convertis, elle s’agrandira rapidement avec l’arrivée d’Onontagués (Onondagas) et d’Agniers (Mohawks), apportant avec eux un fort contingent de captifs hurons pris lors de la destruction de la Huronie en 1649.
Au début des années 1670, quelques familles autochtones, possiblement huronnes, s’étaient regroupées dans un petit hameau sur le versant sud du mont Royal. En 1675, des Hurons de la mission du Sault, qui veulent s’affranchir de leur condition, viennent graduellement s’installer dans le hameau en question. Les Sulpiciens font borner le terrain et construisent un fort de charpente qui accompagne la mission. Le premier missionnaire est rapidement remplacé en 1680 par François Vachon de Belmont, qui consacre une part de sa fortune personnelle à construire la mission. Il fait bâtir une chapelle nommée Notre-Dame-des-Neiges, une maison pour les missionnaires et une palissade qui vient enfermer tous les bâtiments, dont ceux du village autochtone. En 1685, un enclos de maçonnerie est érigé autour des bâtiments français, formant dorénavant le fort de la Montagne. De forme rectangulaire, il est flanqué de quatre tours aux angles. Les deux tours sud sont celles qui subsistent aujourd’hui, faisant d’elles l’un des plus anciens ensembles bâtis de Montréal. En 1690, une grande bassecour, un verger, un pigeonnier et même une fontaine agrémentent la mission. Un village palissadé de plus de 120 cabanes d’Autochtones se situe sur le côté ouest du fort.
Le feu ravage la mission
Mission de la montagne
Cet évènement porte un coup dur à la mission et, dès 1696, une première migration a lieu vers un nouvel emplacement, au Sault-au-Récollet, sur la rivière des Prairies. Elle est suivie d’une autre en 1699, puis encore d’une autre en 1704-1705. Le déménagement est également motivé par l’épuisement des sols pour la culture du maïs et la proximité grandissante des colons dans le quartier Saint-Joseph, la côte Sainte-Catherine et la côte des Neiges. Il semble que certaines familles autochtones demeurent dans la mission jusqu’en 1731. Le terrain est maintenant occupé par le Grand Séminaire de Montréal depuis sa construction dans les années 1850.
Avant-après : Tours du fort de la Montagne
2065, rue Sherbrooke Ouest
1847. La ferme des prêtres [de Saint-Sulpice], de Charles Dawson Shanly. Musée McCord. M971.171.
2014. Le Grand Séminaire de Montréal, par Denis-Carl Robidoux. Centre d’histoire de Montréal.