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Traductions

Contre l’adversité, la résilience de la communauté chinoise à Montréal

26 mai 2021

La communauté sino-montréalaise s’est mobilisée à plusieurs moments de son histoire face au racisme et à la xénophobie. Aujourd’hui encore, elle combat courageusement l’embourgeoisement, la sinophobie et l’intolérance. 

La solidarité par nécessité

Marche 21 mars 2021

一群人在市中心路段上游行。图片正面,一位女孩将中文标语牌举过头顶。
Photo de Richmond Lam, collection privée.

Dès leur arrivée au Québec au début du XXe siècle, les Chinois doivent s’unir pour faire face à un monde qui leur est hostile. Sans leur famille ni leurs réseaux sociaux habituels, ils forment des associations familiales sur le territoire du Quartier chinois d’aujourd’hui. Ces organismes, dits tong, réunissent les gens portant le même nom de famille et originaires du même clan ancestral en Chine. Ils fournissent des services sociaux essentiels à la communauté laissée pour compte par la société québécoise en reproduisant l’organisation sociale de la Chine. Ils proposent des prêts aux nouveaux immigrants, de l’assistance financière aux plus démunis et des services funéraires à ceux qui ne peuvent se les payer. Lors de la Fête de Qing Ming, une journée qui honore les ancêtres, certains tong organisent des trajets en autobus jusqu’au cimetière pour toute la communauté. Les aînés de ces associations servent aussi de mentors et de deuxième famille à plusieurs jeunes Chinois qui sont loin des leurs, une tradition communautaire qui existe encore aujourd’hui.

Résister aux lois discriminatoires

Buanderie chinoise 1963

一家华人洗衣店的内部黑白照。背景站立着一位华裔老人。图片右下角有一位小孩的不完整画面。
Archives de la Ville de Montréal. VM094-C196-0792.
En 1915, une mesure discriminatoire qui taxe les buanderies chinoises à Montréal voit le jour. Cette taxe a pour objectif de pénaliser la diaspora chinoise, alors présente en très grand nombre dans l’industrie de la buanderie. Cette mesure impose aux commerçants une taxe de 50 $ par an, et elle a un effet dévastateur sur la communauté chinoise de Montréal. En effet, plusieurs buanderies chinoises n’arrivent pas à rivaliser avec les autres buanderies qui n’ont pas cette taxe à payer et celles à domicile opérées par des femmes blanches francophones. Un grand nombre d’entre elles doivent fermer leurs portes après seulement un ou deux ans en opération. Malgré une bataille courageuse menée par un groupe de blanchisseurs, cette mesure reste en place.

À la même époque, au niveau fédéral, la taxe d’entrée (1885-1923) et la Loi d’exclusion (1923-1947) visent spécifiquement les Chinois afin de taxer et ensuite proscrire leur immigration au pays. La taxe d’entrée, adoptée en 1885 par un gouvernement fédéral ayant déjà des antécédents de politique anti-asiatique, doit être payée par les immigrants chinois pour entrer au Canada. Initialement de 50 $, cette somme s’élève à 500 $ en 1903, un montant équivalent à deux ans de salaire pour un Chinois de l’époque. Le premier avocat d’origine chinoise admis au barreau canadien en Ontario, Kew Dock Yip, milite contre cette loi comme premier mandat. Après la Seconde Guerre mondiale, des vétérans canadiens d’origine chinoise revendiquent l’égalité des droits et le droit de vote. Grâce à ce combat mené avec des politiciens, des leaders religieux et des syndicats alliés avec les Chinois, les Canadiens d’origine chinoise obtiennent l’abrogation de cette loi en 1947, en plus du droit de vote et du droit à la citoyenneté.

Toutefois, ce n’est qu’après l’adoption de la Charte canadienne des droits et libertés en 1982 que le mouvement de redressement de la taxe d’entrée va prendre son envol. En 1984, deux électeurs de Vancouver demandent au gouvernement fédéral un remboursement de la taxe d’entrée qu’ils ont dû payer, une action qui va amener des milliers de Sino-Canadiens à faire de même. Parmi eux se trouve le militant montréalais de troisième génération William Dere, fils de buandiers ayant grandi à Verdun, dont le grand-père et le père ont tous deux été victimes de cette taxe. Inspiré par son histoire familiale, William, l’avocat Walter Tom et leurs alliés mènent ensemble un combat de 22 ans pour le redressement de la taxe d’entrée et de la Loi d’exclusion. Ils obtiennent une victoire en 2006, quand le gouvernement fédéral émet des excuses officielles aux victimes survivantes et à leurs proches, en plus de financer des programmes culturels et éducatifs qui ont pour objectif de sensibiliser les Canadiens à ces réalités sombres de l’histoire du pays. Ces victimes ou leurs veuves reçoivent 20 000 $ de compensations pour les dommages infligés par cette taxe. Cependant, beaucoup de militants de la communauté chinoise jugent cette mesure insuffisante, car en 2006, moins de 30 personnes ayant payé la taxe d’entrée étaient encore en vie. Ils se battent encore aujourd’hui pour que les enfants de ceux qui ont payé la taxe d’entrée reçoivent une compensation.

Les luttes contemporaines

Association Wong Wun Sun

唐人街建筑外墙顶部特写照。中间那栋建筑上挂有两个中文招牌,其中一个写着“黄云山公所”。
Archives de la Ville de Montréal. VM94-Ad068-037.
Une nouvelle génération de militants chinois a vu le jour dans les années 1970 et 1980. Ces jeunes adultes se réclament d’une identité chinoise perdue durant leur enfance à cause d’une forte pression d’intégration. Beaucoup d’entre eux participent aux grandes luttes contre les projets de développement des années 1970 et pour ramener l’Hôpital chinois dans le Quartier chinois, dont William Dere, qui veut aujourd’hui transmettre ses connaissances et ses expériences d’activisme aux jeunes en milieu scolaire.

Au début de 2020, la pandémie a durement frappé la communauté chinoise et amené ceux souvent qualifiés de minorité modèle silencieuse à se mobiliser. Beaucoup de Chinois à Montréal, jusqu’alors absents de la place publique, prennent la parole pour dénoncer la montée du racisme qu’ils subissent et passent à l’action pour résister à cette haine. Pour protéger le Quartier chinois des crimes haineux subis durant la pandémie, la communauté met en place une patrouille de sécurité nocturne. Cette patrouille, dirigée par Jimmy Chan et Eddy Li, arpente le Quartier chinois chaque nuit pour le protéger des actes de vandalisme, des vols et de la destruction. Les associations communautaires, les associations familiales encore actives aujourd’hui et plusieurs leaders de la communauté se soudent aussi pour livrer des victuailles aux aînés, faire des dons de masques et former des groupes antiracistes. Toute cette solidarité est mise de l’avant durant la grande marche contre le racisme anti-Asiatiques en mars 2021. Exaspérés par ce qu’ils vivent depuis le début de la pandémie, usés par des années ou une vie entière marquées par le racisme, et choqués par la tuerie de mars 2021 à Atlanta, plusieurs milliers de personnes défilent dans les rues du centre-ville de Montréal pour dénoncer le racisme anti-Asiatiques. Cet événement est l’un des plus grands rassemblements militants asiatiques à Montréal des deux dernières décennies.

面对逆境:蒙特利尔华人社区的应变力

此次疫情给华人社区带来了沉重打击,并促使常被称为「沉默的模范少数族裔」的社群动员做出行动。为了免受从疫情中衍生的仇恨罪行侵害,安全巡逻部队会在夜间出现在唐人街。各类社区协会还团结起来为长者提供食物、捐赠口罩并成立反歧视团体。2021年3月反歧视亚裔人士的大游行,正反映了这些团结行动的成果。
这种歧视的根源可以追溯到19世纪末,蒙特利尔华人社区被迫动员维护自身的基本权利,并抵抗带有歧视性的措施和法律,如人头税(1885 -1923)、排华法(1923-1947年)或针对中国洗衣店征税的法律(1915年)。

La traduction en chinois simplifié a été faite par Serena Xiong (熊吟) et révisé par Philippe Liu (刘秦宁).

面對逆境:滿地可華人社區的應變力

此瘟疫給華人社區帶來了沉重打擊,並促使常被稱為「沉默的模範少數族裔」社群動員作出行動。為了免受從瘟疫中衍生的仇恨罪行侵害,安全巡邏部隊夜間在唐人街出動。社區協會還團結起來為長者提供食物、捐贈口罩並成立反歧視團體。2021年3月反歧視亞裔人士的大遊行正反映了這些團結行動的成果。

此等歧視的根源可以追溯到19世紀末,滿地可社群需動員維護自身基本權利,並抵抗帶歧視性的措施和法律如人頭稅(1885 -1923)、排華法(1923-1947年)或針對中國洗衣店徵稅的法律(1915年)。

Traductrice : Wai Yin Kwok.

Référence bibliographique

CHAN, Kwok Bun. Smoke and Fire: The Chinese in Montreal, The Chinese University of Hong Kong Press, 1991, 330 p.