Paysage du Cimetière Mont-Royal

Paysage

Légende : (2007) Vue aérienne de l'entité, vers le sud-ouest
Source : Tiré de: VALOIS, N., FAUTEUX ET ASSOCIÉS, et BEAUPRÉ et MICHAUD. Analyse paysagère de l’arrondissement historique et naturel du Mont-Royal. Historique et caractérisation des paysages. Montréal, Ville de Montréal, Ministère de la Culture, des Communications et de la Condition féminine, Conférence régionale des élus de Montréal, 2010, p. 136
Credit : Air Imex Ltée

Groupe d'onglets

Informations générales

La place du secteur dans le paysage

Un cimetière protestant au cœur du mont Royal

Le cimetière Mont-Royal se situe dans l’unité topographique de l’entre-monts dont les vastes espaces occupent tout le bassin central de la montagne, délimité par la ligne de crête reliant les trois sommets. L’entre-monts est une vaste zone arborée où se trouvent les cimetières Notre-Dame-des-Neiges et Mont-Royal, ainsi que le parc du Mont-Royal. L’accès au cimetière Mont-Royal s’effectue selon une approche pittoresque à partir du chemin de la Forêt au nord-est (dans la continuité du boulevard Mont-Royal) ou de la voie Camillien-Houde au sud-ouest. Les cimetières de la montagne se partagent les hauteurs de la colline d’Outremont, mais seulement un accès piétonnier permet de passer d’un cimetière à l’autre.

La topographie du terrain est un facteur majeur dans l’organisation spatiale du cimetière Mont-Royal. Le site est entièrement vallonné avec des contours assez escarpés, formant une dépression en cuvette. La voie Camillien-Houde, le mont Murray (autre nom donné au sommet Outremont) et la frontière longeant le cimetière Notre-Dame-des-Neiges sont des parties surélevées, alors que le cœur du cimetière est en pente douce en direction de l’accueil. Le chemin principal, au caractère romantique, suit la topographie du site et permet de découvrir les lieux de manière progressive. Cette configuration géographique confère un caractère intimiste au cimetière. Un important ruisseau traversait à l’époque le cimetière et les eaux de ruissellement parcouraient le site. Actuellement, la source du ruisseau Outremont se situe à proximité du complexe funéraire.

Situé au cœur du fond de la vallée de la montagne, le cimetière Mont-Royal a été fondé en 1852 par la communauté protestante de Montréal. Son aménagement paysager et la plantation d’espèces très variées répondent au concept de cimetière-jardin. Il est l’un des premiers cimetières ruraux d’Amérique du Nord et est reconnu aujourd’hui pour son caractère pittoresque exceptionnel. Les cimetières Mont-Royal et Notre-Dame-des-Neiges proposent, du point de vue paysager, deux visions distinctes face à la mort. Le premier relève du cimetière-jardin où le cadre naturaliste prédominant représente une allégorie du paradis terrestre et une vision romantique de la mort. Le second, un lieu urbain naturalisé où prédominent les monuments et les symboles religieux, traduit une conception de la mort associée au jugement suprême et une conviction de rédemption après la mort.

Un cimetière-jardin

Le Rural Cemetery Movement, qui naît au début du 19e siècle, est d’abord philosophique. Il enseigne que la mort n’est pas seulement synonyme de destruction, mais plutôt de participation au cycle biologique du retour à la terre. Ce mouvement vise à aménager des lieux de repos pour les morts et de recueillement pour les vivants, en créant un espace social en harmonie avec la nature environnante. Le cimetière porte aussi des vertus patriotiques et civiques, car il doit donner le sens de la continuité historique et des racines sociales. Le précurseur de cette approche est le Mount Auburn Cemetery de Cambridge (Massachusetts) aménagé en 1831. Le cimetière rural se distingue d’abord par sa topographie irrégulière et ses chemins sinueux. Ensuite, le paysage est fragmenté dans le but de multiplier les points de vue qui se succèdent à la manière d’un tableau.

Le cimetière-jardin du Mont-Royal est conçu en 1852 par l’ingénieur et architecte paysagiste américain James C. Sidney et son associé P. W. Neff. Planifié comme « cimetière et jardin publics », il est marqué par sa composition organique et verdoyante au sein d’un paysage naturel. Le tracé d’implantation des sépultures dans les îlots varie selon l’aménagement paysager et les monuments artistiques. Les sépultures sont au cœur d’îlots arrondis traversés par des allées sinueuses et au cœur de vallons irréguliers. Le cimetière est aujourd’hui un véritable arboretum grâce à ses nombreuses essences d’arbres diverses, ses stèles funéraires fleuries et ses mausolées intégrés à la topographie du mont Royal.

Trois grands types de regroupement de la végétation sont visibles dans le cimetière. Les espaces les plus densément boisés sont les pourtours du cimetière et le mont Murray. Puis, des arbres isolés parsèment les îlots de recueillement. Enfin, de petits massifs arbustifs ainsi que des plantations horticoles encadrent les monuments et édifices. Le mont Murray, situé sur les contreforts du sommet Outremont, est composé de deux terrasses séparées par une pente abrupte et boisée, et offre une vue panoramique sur le cimetière. La terrasse sud-ouest longeant la frontière avec le cimetière Notre-Dame est surélevée et accueille des tombes en rangées. La terrasse est, le long de la voie Camillien-Houde, est marquée par des îlots longitudinaux et offre des vues sur l’intérieur du cimetière.

Une expérience paysagère romantique

Accueillant près de 200 000 pierres tombales au style très varié et situé au cœur d’un cadre paysager pittoresque, le cimetière a été désigné comme Lieu historique national du Canada. Les sentiers sinueux, l’abondance de végétation, la quiétude générale qui y règne et l’équilibre entre les monuments et le cadre naturel participent à la création d’un cadre paysager d’exception, traduisant la volonté des concepteurs d’aménager un cimetière-jardin.

C’est dans ces paysages pastoraux que se trouvent de nombreux arbres remarquables. Ils y sont dispersés et visibles sur de longues distances. C’est d’abord par l’emprunt de chemin et de sentier sur ce territoire en déclivité que l’on peut contempler la richesse arboricole indigène et exotique de ce cimetière-jardin. On peut observer ces arbres majestueux au fil d’une succession paysagère variée : portail d’entrée finement aménagé et ornementé, forêt pentue aux parois rocheuses, plan-pelouse à l’américaine, jardins à l’anglaise, etc. Outre la richesse arboricole, la qualité du paysage inerte du cimetière Mont-Royal mérite d’être soulignée. Elle se manifeste par une architecture funéraire considérable ainsi qu’une grande variété de monuments (cippes, stèles, obélisques, plaques, mausolées, etc.) qui contribuent à l’élaboration d’un récit historique et social. On peut y lire la généalogie des familles et parfois comprendre le contexte de l’implantation des arbres remarquables à proximité.

Des arbres remarquables au cœur du cimetière

Parmi les 10 000 arbres inventoriés, 20 ont été qualifiés d’arbres remarquables issus de trois origines différentes. Six d’entre eux sont très anciens et proviennent du peuplement forestier initial du site, une érablière à caryer cordiforme : un caryer cordiforme (Carya cordiformis), un frêne blanc (Fraxinus americana), trois érables à sucre (Acer saccharum) et un chêne rouge (Quercus rubra). Présents avant la création du cimetière en 1852, ils auraient fait partie du boisé Outremont. Le septième, un chicot févier (Gymnocladus dioicus), serait le témoin le plus inattendu d’anciens campements autochtones sur le mont Royal. Quatre autres arbres remarquables ont été plantés dans la volonté de commémorer des défunts. Deux métaséquoias de Chine (Metasequoia glyptostroboides) datant de 1949 sont les premiers plantés au Canada. Les deux autres arbres, un érable à sucre (Acer saccharum) et un frêne blanc (Fraxinus americana), sont situés à proximité des tombes et leurs dates de plantation correspondent aux dates d’inhumation. Enfin, les neuf derniers arbres remarquables sélectionnés s’inscrivent dans le projet de cimetière-jardin souhaité par les administrateurs : un érable de Norvège (Acer platanoides), un bouleau à papier (Betula papyrifera), deux érables à sucre (Acer saccharum), un if japonais (Taxus cuspidata), un cerisier tardif (Prunus serotina), un micocoulier occidental (Celtis occidentalis), un hêtre européen (Fagus sylvatica « Pendula ») et enfin un ginkgo bilobé (Ginkgo biloba). Ils témoignent des volontés des premiers aménagements paysagers du site.

Légende : Cimetière Mont-Royal
Credit : Cha, J. 2014

Documentations

Références bibliographiques

BEVERIDGE, Charles E. Le mont Royal dans l’œuvre de Frederick Law Olmsted. Ville de Montréal, Ministère de la Culture, des Communications et de la Condition féminine, 2002, 66 p.

COMMISSION DES BIENS CULTURELS DU QUÉBEC. Étude de caractérisation de l’arrondissement historique et naturel du Mont-Royal. Décembre 2005.

MBRODEUR CONSULTANT INC. État des lieux et des plans d’action pour la conservation et la mise en valeur des composantes patrimoniale des cimetières du Mont-Royal. 2006. En ligne. http://ville.montreal.qc.ca/pls/portal/docs/page/bureau_mtroyal_fr/media....

VALOIS, N., FAUTEUX ET ASSOCIÉS, et BEAUPRÉ et MICHAUD. Analyse paysagère de l’arrondissement historique et naturel du Mont-Royal. Historique et caractérisation des paysages. Montréal, Ville de Montréal, Ministère de la Culture, des Communications et de la Condition féminine, Conférence régionale des élus de Montréal, 2010, 302 p.

VILLE DE MONTRÉAL et MINISTÈRE DE LA CULTURE, DES COMMUNICATIONS ET DE LA CONDITION FÉMININE. Atlas du paysage du mont Royal, caractérisation du paysage à l’échelle de la montagne. 2012. 233 p.

YOUNG, Brian. Respectable Burial : Montreal’s Mount Royal Cemetery. McGill-Queens University Press, 2003, 230 p.

Nom de la propriété

Cimetière Mont-Royal

Unité topographique