Maître du monde du jeu et des paris illégaux, riche homme d’affaires, Harry Ship bénéficiait impunément du système de protection policière qui sévissait à Montréal dans les années 1940.
« C’était un homme relativement jeune, d’un commerce très agréable et, de toute évidence, infiniment plus cultivé que ses comparses. » — Pax Plante, avocat
Harry Ship
Lui-même avide joueur, Harry Ship a la réputation de calculer les chances de gagner mieux que quiconque et joue des sommes astronomiques, ses mises pouvant s’élever jusqu’à plusieurs centaines de milliers de dollars par semaine. Aimant la publicité, il n’hésite pas à financer ouvertement une équipe de baseball junior (les Shipmates) et à distribuer des crayons sur lesquels est inscrit le numéro de sa maison de paris! L’écrivain Mordecai Richler immortalisera ce personnage flamboyant dans son roman The Apprenticeship of Duddy Kravitz.
Après la mort du « Roi de la pègre », Harry Davis, en juillet 1946, Ship devient l’une des têtes dirigeantes de la pègre juive montréalaise et son entreprise illégale lui rapporte plus de 1500 dollars par jour, une somme astronomique pour l’époque. Il exploite également une centrale d’information qui, grâce à un système télégraphique, transmet les résultats des courses de chevaux et des parties sportives de partout en Amérique du Nord aux différentes maisons de paris de Montréal.
Montréal illicite
Ce texte de Maryse Bédard est tiré du livre Scandale! Le Montréal illicite 1940-1960, sous la direction de Catherine Charlebois et Mathieu Lapointe, Montréal, Cardinal, 2016, p. 169.
Harry Ship - carnet d’adresses
En 1946, le « Roi du jeu », Harry Ship, est arrêté au Tic Toc, l’une des boîtes de nuit de la ville dont il est propriétaire. Les policiers saisissent alors sur lui un petit carnet d’adresses qui contient les noms de ses nombreux clients et contacts, dont nul autre que le maire Camilien Houde. Outre le carnet d’adresses, les autorités trouvent dans son établissement de la rue Sainte-Catherine 22 boîtes de crayons à son nom en plus de nombreuses cartes de visite faisant la promotion de ses activités illicites, ce qui montre à quel point il ne craignait pas les autorités.
BRODEUR, Magaly. Vice et corruption à Montréal, 1892‑1970, Québec, Presses de l’Université du Québec, 2011, 129 p.
CHARLEBOIS, Catherine, et Mathieu LAPOINTE (dir.). Scandale! Le Montréal illicite 1940-1960, Montréal, Cardinal, 2016, 272 p.
CHARBONNEAU, Jean-Pierre. La filière canadienne, Montréal, Les Éditions de l’Homme, 2002, 597 p.
DE CHAMPLAIN, Pierre. Histoire du crime organisé à Montréal de 1900 à 1980, Montréal, Les Éditions de l’Homme, 2014, 502 p.
LAPOINTE, Mathieu. Nettoyer Montréal : les campagnes de moralité publique, 1940 1954, Québec, Septentrion, 2014, 395 p.
PLANTE, Pacifique. Montréal sous le règne de la pègre, Montréal, Éditions de l’Action nationale, 1950, 96 p.
MORTON, Suzanne. At Odds: Gambling and Canadians, 1919‑1969, Toronto, University of Toronto Press, 2003, 272 p.