De 1877 à 1970, le bâtiment de la gare du Mile End était le point focal d’un secteur s’articulant autour de la voie ferrée du Canadien Pacifique.
Gare du Mile End
Le chemin de fer nommé « Québec, Montréal, Ottawa et Occidental », reliant Hochelaga, le Mile End et Saint-Jérôme, a été ouvert le 16 octobre 1876. Des prolongements de Sainte-Thérèse à Hull, puis de Saint-Martin (Laval) à Québec ont été créés dans les années suivantes. Le Canadien Pacifique (CP) en a fait l’acquisition en 1882 (pour la division ouest) et en 1885 (pour la division est).
Une première gare
Une dispute sur la localisation de la gare du Mile End a retardé sa construction jusqu’au printemps 1877. La gare a été envisagée initialement près de l’intersection des avenues du Mont-Royal et Henri-Julien, soit très près de la partie développée du Mile End et du village voisin de Saint-Jean-Baptiste. L’impératif d’atteindre la rive du Saint-Laurent (à Hochelaga) en contournant vers l’est la topographie élevée du secteur Mile End a contraint la compagnie à dévier la voie principale à partir du boulevard Saint-Laurent. La gare du Mile End pouvait être au fond d’un embranchement ou sur la ligne principale à un mille du village. C’est finalement cette dernière option qui a été adoptée (avec le soutien de Louis Beaubien, propriétaire du terrain où la gare a été érigée). L’édifice a été incendié lors d’un cambriolage, le 6 décembre 1878, puis reconstruit selon les mêmes plans et rouvert en février 1879.
Une nouvelle gare
Gare du Mile End
La nouvelle gare ne sera en service que pendant 20 ans. Déjà, depuis 1889, le CP dispose de deux terminus au centre de Montréal. Le premier, installé initialement en 1884 au square Dalhousie, puis, à partir de 1898, au square Viger, est situé au bout de la ligne du Mile End, près de la rue Berri. Le second est la gare Windsor, ouverte en 1889 pour desservir les lignes des Maritimes, des États-Unis et du sud de l’Ontario. Les voies d’accès des deux terminus forment comme un étau autour de la ville avec un point de jonction un peu au nord du Mile End. Les trains transcontinentaux utilisaient la ligne du Mile End à leurs débuts, en 1886, mais sont orientés vers la gare Windsor avant la fin du siècle. À partir des années 1920, le CP dévie certains trains de Québec vers la gare Windsor pour faciliter les correspondances vers Toronto et l’Ouest canadien, ce qui les empêche de s’arrêter dans le Mile End et incommode des voyageurs influents d’Outremont. Le CP est alors obligé d’instaurer un arrêt équivalent sur l’autre branche, à l’intersection de l’avenue du Parc et de la rue Saint-Zotique. Le problème est enfin résolu par l’ouverture, le 1er novembre 1931, de la nouvelle gare Park Avenue (ou gare Jean-Talon), localisée en amont du point de jonction. La gare du Mile End est alors fermée.
Nouvelle vocation et démolition
Mile End - voie ferrée
Cette disparition, suivie de l’abandon progressif des activités ferroviaires de desserte industrielle, a laissé le paysage actuel de la rue Bernard Est plutôt difficile à déchiffrer. Quelques vestiges de la gare s’y trouvent encore : un pavage au sol en brique rouge et la clôture typique du CP le long de la rue Bernard.
L’ensemble du site ferroviaire du Mile End (gare et partie restante de la cour Saint-Louis, appelée Champ des Possibles) est vendu à la Ville de Montréal en 2009. À la suite d’une consultation publique sur les abords de la voie ferrée menée par l’arrondissement du Plateau-Mont-Royal et les Amis du Champ des Possibles en 2015, le secteur sera consacré à des fins écologiques et récréatives.
Cet article est tiré du texte Gare du Mile End, rédigé en 2016 et disponible sur le site Internet de l’association Mémoire du Mile End.
DESJARDINS, Yves. Histoire du Mile End, Québec, Septentrion, 2017, 355 p.