Le Montréal des années 1950 bouillonne de vie culturelle et se colore des milliers d’immigrants arrivés à la suite du conflit mondial. Parmi eux, une femme est décidée à faire danser la métropole.
Ludmilla Chririaeff - 1952
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Ludmilla Chririaeff - 1955
Montréal artistique
Ludmilla Chririaeff - danseurs
La prospérité d’après-guerre encourage la production et la consommation culturelles. Montréal foisonne de cinémas, de cabarets, de music-halls. Avec sa concentration d’artistes, la métropole est le visage de la modernité et fait contrepoids à l’Église catholique toujours omniprésente. Dans ce contexte, l’arrivée de la télévision et de la Société Radio-Canada (SRC) joue un rôle particulièrement novateur en proposant une riche programmation artistique.
Ludmilla est d’ailleurs rapidement présentée à Jean Boisvert, premier réalisateur embauché par la SRC. Cette dernière offre à Ludmilla une plage horaire mensuelle pour la présentation d’un ballet. À peine un an après son arrivée à Montréal, Ludmilla s’occupe de la préparation des chorégraphies pour l’ensemble de la programmation de 1953 de l’émission l’Heure du concert.
Montréal danse
Ludmilla Chririaeff - 1955
Ludmilla Chririaeff - ballet-opéra-rock Tommy
Merci aux famille Chiriaeff et Le Coz d'avoir autorisé la publication des images. Merci également à Marie-Josée Lecours, bibliothécaire en chef de la Bibliothèque de la danse Vincent-Warren, d'avoir collaboré à la recherche iconographique.
Les ballets télévisés de Ludmilla et de ses collègues sont loin de faire l’unanimité dans les années 1950. La Société Radio-Canada est alors bombardée de plaintes décriant la perversion de telles représentations. Voici par exemple l’extrait d’une lettre manuscrite signée par une Montréalaise et datée du 25 avril 1956 : « Permettez de vous écrire pour vous donnez un avertissement au sujet de vos ballets qui passent le lundi soir à porte ouverte. Ah que c’est scandaleux, c’est pourquoi que nous vous avertissons avant d’agir car ca fait assez longtemps que ç’a dure cette cochonnerie a la télévision nous en sommes tannés, de voir ce collage et décolletage alors si vous ne changez pas et si ne vous habillez pas votre personnel pas plus que cela nous sommes un groupe pour faire signer une requête et faire disparaitre ce numéro salo a ce programme. »
L’intégration de la famille Chiriaeff à la vie montréalaise n’est pas toujours rose. Dans un contexte mondial de guerre froide, les gens d’origine russe sont souvent étiquetés comme appartenant au régime soviétique. L’une des filles de Ludmilla se souvient : « On était tellement différents. En 1956, l’année de l’invasion de la Hongrie par les Russes, mes frères et moi, on se faisait battre. On s’est fait trainer dans les entrées des garages qui étaient en gravier par des plus grands que nous. On était des Russes, donc des méchants. »
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