En 1981, Dary Chan quitte un camp de réfugiés pour Montréal, accompagnée de son mari et de six enfants, dont quatre adoptés. Détermination et volonté d’ascension sociale caractérisent son parcours.
Dans le cadre du programme Mémoires d’immigrantes, le Centre d’histoire de Montréal a rencontré des Montréalaises venues d’ailleurs qui ont généreusement raconté leur récit personnel. Une série d’articles « Témoignages » dresse les grandes lignes de parcours uniques qui s’enchâssent et contribuent à l’histoire de la ville.
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Le 19 septembre 2018, le Centre Khemara, le Centre d’histoire et civilisation khmères, les bonzes des pagodes khmères du Canada et les Cambodgiens du Canada ont organisé, à Montréal, une journée de commémoration à la mémoire des victimes cambodgiennes de 1975 à 1979.
Entre 1979 et 1982, environ 7000 Cambodgiens sont arrivés au Canada. L’envahissement du Cambodge par les troupes vietnamiennes et la chute du régime des Khmers rouges, en 1975, étaient à l’origine de ce flux migratoire.
Un processus de réunification familiale
Dary Chan - camp
Bénéficiant de la Loi sur l’immigration de 1976, reconnaissant les réfugiés comme catégorie d’immigrants admissibles (au sens de la Convention relative au statut des réfugiés des Nations Unies), la famille a également reçu l’aide de l’homme d’affaires Paul Desmarais pour faciliter son installation et l’aider à payer un logement (un cinq et demi), dans lequel elle vit pendant plusieurs années. Dary précise : « Monsieur Desmarais nous a aidés avec 200 dollars par mois pour le loyer, pendant un an. » Elle devra rembourser le billet d’avion au gouvernement canadien, soit 50 dollars par semaine.
Formation et mobilité professionnelle
Dary Chan - famille
Dès son emménagement à Montréal, Dary a travaillé trois mois comme étiqueteuse dans un magasin de vêtements. Elle cumulait alors une activité professionnelle la journée et des cours du soir à l’école Saint-Henri, jusqu’à l’obtention de sa cinquième année du secondaire. Dary est une femme active, puisqu’en 1986 seulement 41,9 % des femmes cambodgiennes au Canada étaient sur le marché du travail contre 64,6 % des hommes originaires du Cambodge. Satisfaite de sa production, l’entreprise lui propose de travailler « sur le plancher » pour placer les marchandises et avoir un contact direct avec les clients. Elle occupera ensuite le poste de caissière, puis celui de secrétaire jusqu’à la fermeture définitive de l’entreprise en 1994. « J’étais bonne en chiffres », explique Dary.
C’est alors qu’elle demande au bureau de l’assurance-emploi une formation en gestion financière informatisée, qui lui sera accordée grâce à ses bons résultats scolaires. Elle obtiendra une attestation en gestion financière informatisée au Collège de Bois-de-Boulogne. Après l’obtention de son diplôme, Dary envoie des candidatures et est recrutée au Collectif des femmes immigrantes du Québec, en 1997, comme adjointe administrative. « Elle m’a choisie. Je n’avais pas l’expérience. Elle a dit que ce n’est pas grave. Elle m’a fait passer le test. J’ai réussi tout. Elle m’a choisie […] Depuis ce temps, je travaille toujours avec Aoura », dit Dary en parlant de la conseillère en recrutement de l’époque.
Du traditionnel au traditionnellement masculin
Dary Chan
Puis Dary a démontré, encore une fois, qu’elle pense différemment. En 2001, elle passe une entrevue pour travailler comme chauffeuse d’autobus à la Société des transports de Montréal (STM), à la suite d’une activité de recrutement organisée au Collectif. « La STM voulait avoir des chauffeuses d’autobus immigrantes. La STM est venue recruter au Collectif. Il fallait avoir le permis de camion […] Mais à la fin, on m’a choisie, on m’a dit que, tout de suite, il faut aller chercher le permis », explique Dary. Elle allait donc exercer un métier traditionnellement masculin, occupé encore en 2019 par moins de 33 % de femmes, selon le ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur. Cependant, Dary abandonne ce projet à cause des contraintes liées aux conditions de travail le soir. Elle a été réembauchée au Collectif comme adjointe administrative, où elle tient « le cordon de la bourse », comme à la maison.
Apport et transmission d’un héritage familial
Dary Chan - famille élargie
Dary Chan est l’exemple évident d’une ascension sociale réussie et d’un héritage culturel reconnu et partagé par la descendance et la société d’accueil.
À Montréal, le Centre Khemara participe à cette mission puisqu’il vise à « promouvoir la culture khmère auprès des jeunes nés ou ayant grandi loin de leurs racines, ainsi qu’à favoriser l’échange socioculturel entre les Cambodgiens et les Montréalais de toutes origines ».
DORAIS, Louis-Jacques. « Les Cambodgiens, Laotiens et Vietnamiens au Canada », [En ligne], La société historique du Canada, Les groupes ethniques du Canada, brochure no 28, 2000.
https://cha-shc.ca/_uploads/5c37599e2c931.pdf
SOCIÉTÉ DES TRANSPORTS DE MONTRÉAL. « Inclusif depuis 1987. Portrait de la diversité à la STM au 31 décembre 2018 », [En ligne], Diversité.
http://www.stm.info/fr/a-propos/informations-entreprise-et-financieres/diversite
MUSÉE CANADIEN DE L’IMMIGRATION DU QUAI 21. « Loi sur l’immigration de 1976 », [En ligne], Histoire de l’immigration.
https://quai21.ca/recherche/histoire-d-immigration/loi-sur-l-immigration-de-1976
MINISTÈRE DE L’ÉDUCATION ET DE L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR. « Métiers et professions traditionnellement masculins », [En ligne], Condition féminine, 2019.
http://www.education.gouv.qc.ca/le-ministere/condition-feminine/metiers-et-professions-traditionnellement-masculins/