Comme pour beaucoup de jeunes immigrants, c’est l’esprit d’aventure qui mène Laura à Montréal. Cette folie de jeunesse a toutefois pris une forme inattendue, une réelle mission sociale.
Dans le cadre du programme Mémoires d’immigrantes, le Centre d’histoire de Montréal a rencontré des Montréalaises venues d’ailleurs qui ont généreusement raconté leur récit personnel. Une série d’articles « Témoignages » dresse les grandes lignes de parcours uniques qui s’enchâssent et contribuent à l’histoire de la ville.
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Laura Noyer
Un papillon dans la cité
Laura Noyer - 2 ans
Paris-Montréal
Laura Noyer 2004
Plus récemment, parmi les déplacements France-Québec, la province attire de nombreux jeunes qui partent dans le contexte du Programme Vacances-Travail, mieux connu sous l’acronyme PVT. Ce dernier s’adresse aux gens de 18 à 30 ans et permet de voyager sur une longue durée (généralement 12 mois), tout en ayant l’autorisation de travailler. En 2017, ce sont plus de 6800 jeunes venus de France qui se rendent au Canada en tant que « pvtistes ». C’est par cette voie que Laura atterrit à Montréal en 2004.
Portée par la force et l’indépendance de sa grand-mère et de sa mère, Laura déniche un contrat comme fille au pair dans une famille d’origine irlandaise. Logée, nourrie et blanchie, elle s’occupe des enfants, apprend l’anglais et profite de ses temps libres pour se créer un réseau en sol québécois. La jeune immigrante travaille en effet à briser le cycle de la solitude et de l’isolement souvent lié au processus d’intégration.
« Tout est possible »
Laura Noyer et son fils
Tout est possible, oui, surtout parce que Laura se donne les moyens de réussir. Peu après son arrivée, elle choisit de s’impliquer en faisant du bénévolat. Elle trouve chaussure à son pied au Collectif des femmes immigrantes du Québec, un organisme d’aide à l’intégration. Elle y rencontre Aoura Bizzarri, directrice du Collectif et militante pour les droits des femmes immigrantes depuis plus de 30 ans. Elle partage avec elle plusieurs valeurs, dont la justice sociale et la rigueur au travail. En l’espace de quelques années, elle passe de bénévole à coordonnatrice de projets pour l’employabilité à Montréal et pour le Centre de femmes. Et, puisque tout est possible, elle entreprend parallèlement des études en archivistique et en muséologie. Son parcours est aussi marqué par une belle pause, lorsqu’elle donne naissance à son fils Timo, en 2013, à Montréal.
Armée pour défendre la cause
Laura Noyer et sa mère
En effet, en 2015, plus de 63 % des immigrants montréalais détenant un diplôme universitaire étranger sont surqualifiés pour le travail qu’ils occupent. Or, rappelons que les immigrants économiques sont notamment sélectionnés sur la base de leurs qualifications. Par ailleurs, en comparaison aux hommes, les femmes immigrantes assument davantage le fardeau de l’intégration en acceptant des emplois sous-qualifiés et mal payés, mais qui permettent la survie familiale. Aux difficultés d’intégration s’ajoutent les défis liés à la conciliation travail-famille, dont le manque de places en service de garde subventionné. Laura est quotidiennement aux prises avec cette réalité. Pour elle, le plus difficile demeure d’annoncer à ces femmes qualifiées et expérimentées qu’elles devront sans doute mettre une croix sur la carrière rêvée.
Investie dans son travail, Laura souhaite d’ailleurs entretenir l’esprit engagé qui est aux origines de la fondation de l’organisme : « C’est vrai qu’on s’entend bien avec les bailleurs de fonds, dit-elle en riant, mais il n’empêche qu’il y a du travail à faire concernant les femmes immigrantes, concernant les nouveaux immigrants, donc il faut continuer à prendre position par rapport à cette problématique. » Et c’est armée des valeurs de justice, d’ouverture et de respect héritées des femmes de sa vie qu’elle continuera à lutter pour cette cause.
BEN SOLTANE, Sonia. « Dans l’intimité familiale des immigrantes. Le travail domestique d’intégration des femmes maghrébines », dans ROBERT, Camille, et Louise TOUPIN (dir.), Travail invisible. Portrait d’une lutte féministe inachevée, Montréal, Remue-Ménage, 2018, p. 71-82.
CZERWINSKI, Natacha. « L’immigration française au Québec est une exception », [En ligne], L’Express Emploi, 26 novembre 2018.
https://www.lexpress.fr/emploi/gestion-carriere/l-immigration-francaise-au-quebec-est-une-exception_2050068.html
IMMIGRATION, DIVERSITÉ ET INCLUSION QUÉBEC. Portrait statistique de la population d’origine ethnique antillaise au Québec en 2011, [En ligne], Gouvernement du Québec, 2014.
http://www.quebecinterculturel.gouv.qc.ca/publications/fr/diversite-ethnoculturelle/com-antillaise-2011.pdf
HOMSY, Mia, et Sonny SCARFONE. Plus diplômés, mais sans emploi. Comparer Montréal : le paradoxe de l’immigration montréalaise, [En ligne], Montréal, Institut du Québec, 2016.
https://www.institutduquebec.ca/docs/default-source/recherche/8447_plusdiplomes_idq-rpt_fr.pdf?sfvrsn=2
LINTEAU, Paul-André. « Quatre siècles d’immigration française au Canada et au Québec », dans JOYAL, Serge, et Paul-André LINTEAU (dir.), France-Canada-Québec. 400 ans de relations d’exception, Montréal, Presses de l’Université de Montréal, 2008, p. 165-181.
MARIE, Claude-Valentin. « Des “Nés” aux “Originaires”. Dom en métropole : les effets de cinquante ans d’une politique publique ininterrompue d’émigration », [En ligne], Informations sociales, 2014/6, no 186.
https://www.cairn.info/revue-informations-sociales-2014-6-page-40.htm#
PVTISTES.NET. « Statistiques 2017 du PVT [Programme Vacances-Travail] », [En ligne], Pvtistes, 1 novembre 2018.
https://pvtistes.net/statistiques-2017-pvt/