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Le cimetière catholique Saint-Antoine

19 janvier 2016

Comment imaginer qu’à l’emplacement actuel de la place du Canada et du square Dorchester se trouvait le cimetière catholique Saint-Antoine, où furent inhumées environ 55 000 personnes?

En 1799, la Fabrique de la paroisse Notre-Dame de Montréal fermait, pour des raisons d’hygiène et d’espace, les derniers cimetières à l’intérieur de la vieille ville et ouvrait le cimetière Saint-Antoine à l’emplacement actuel de la place du Canada et du square Dorchester. Environ 55 000 personnes, notables comme pauvres, y furent inhumées entre 1799 et 1855, année d’ouverture du cimetière Notre-Dame-des-Neiges sur le mont Royal. Il s’agit, entre autres, des victimes des nombreuses épidémies de choléra C en 1832, on parle même du « cimetière du choléra », de la plupart des patriotes de 1837-1838 exécutés devant la prison du Pied-du-Courant et même de Ludger Duvernay (1799-1852), le fondateur de la Société Saint-Jean-Baptiste.

Hors des murs de la ville

Vue de Montréal depuis le mont Royal

Vue panoramique de Montréal depuis le mont Royal.
Montreal, Canada East. From the Mountain. No. 26 of Whitefield’s series « View of North American Cities », Rare Books and Special Collections, McGill University Library.
Selon la chronologie du cimetière Saint-Antoine, que la Fabrique possède dans ses archives, le Grand Jury soumet dès 1795 une requête au procureur général Sewell : les cimetières existants sont une menace pour la santé et on doit les mettre hors des murs de la ville. La Fabrique acquiert alors, le 15 décembre 1799, la terre de Pierre Guy, dans le faubourg Saint-Antoine, et les premières sépultures se font deux semaines plus tard. La maison du gardien et la chapelle des morts sont quant à elles érigées en 1806. Pour accroître la superficie du cimetière Saint-Antoine, d’autres lots seront achetés successivement en 1807, 1823 et 1842.

Cependant, ce n’est qu’à partir du mois de mai 1821 que les travaux de translation des restes des cimetières du Vieux-Montréal vers le cimetière Saint-Antoine seront entrepris. L’année 1832 est dramatiquement marquée par une épidémie de choléra et par de nombreuses sépultures. Par ailleurs, la fondation de la Société Saint-Jean-Baptiste se tient en 1834 dans les jardins attenants au cimetière (site de la gare Windsor). En 1838 et 1839 a lieu l’inhumation des dépouilles des patriotes exécutés. Et les funérailles de Ludger Duvernay, le 1er décembre 1852, se terminent par la mise en terre du cercueil au cimetière (la dépouille de Duvernay sera transférée au cimetière Notre-Dame-des-Neiges en 1855).

Encore un déménagement

Cimetière Saint-Antoine

Exhumation des restes humains de l'ancien cimetière Saint-Antoine pour faire place au square Dominion.
Canadian Illustrated News, Montreal : Geo. E. Desbarats, 1869-1883, 27 mai 1871, vol. 3, no 21.
Un nouveau règlement de la Ville défendant l’inhumation dans les limites de la cité, la Fabrique décide, en 1853, de créer un nouveau cimetière. L’année suivante, elle achète la terre du docteur Beaubien sur le mont Royal, où le cimetière Notre-Dame-des-Neiges accueillera une première sépulture le 27 mai 1855. On procédera, au cours des 15 années suivantes, au déménagement des sépultures du cimetière Saint-Antoine vers le cimetière Notre-Dame-des-Neiges, mais un grand nombre de dépouilles resteront sur place. Le cimetière Saint-Antoine aura été, pendant plus de 50 ans, le seul lieu de sépulture des catholiques de Montréal.

Enfin, devant les pressions de la Sanitary Association, la Ville de Montréal décide, en 1873, d’acquérir le vieux cimetière pour le transformer en parc. En ce sens, ce parc existera à cause des morts que son sol contient. D’ailleurs, à l’occasion du 200e anniversaire de la fondation du cimetière Saint-Antoine, l’Écomusée de l’Au-Delà, avec la collaboration d’Héritage Montréal, avait rappelé leur présence en cet endroit, en tenant une cérémonie commémorative le 31 octobre 1999, sur la partie sud de la place du Canada.

Cet article est paru dans le numéro 46 du bulletin imprimé Montréal Clic, publié par le Centre d’histoire de 1991 à 2008.