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Le travail de commissaire à l’Office de consultation publique de Montréal

24 octobre 2022

Experts de la consultation publique, les commissaires de l’OCPM apportent une contribution significative à la démocratie montréalaise.

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Seize personnes sont réunies autour d’une plusieurs tables disposées en rectangle.
Office de consultation publique de Montréal
Le commissaire à l’Office de consultation publique de Montréal (OCPM) exerce un travail de longue haleine qui demande un grand engagement, beaucoup d’écoute, de l'empathie et de grandes qualités humaines. En 2022, plus de 30 personnes sont commissaires ad hoc à l’OCPM, c’est-à-dire qu’elles sont sollicitées selon leurs champs d’expertise pour différentes commissions, mais ne travaillent pas à temps plein pour l’Office. Quelles sont les grandes étapes de leur travail? Qu’est-ce qu’implique siéger à une commission ou en présider une? En avril 2022, nous avons rencontré Judy Gold, commissaire à l’OCPM depuis 2004, qui nous raconte les différentes facettes de sa tâche.

Les étapes d’une consultation

OCPM - dossier

Vue de l’arrière d'une séance de consultation publique à laquelle plusieurs dizaines de personnes assistent. On voit au loin cinq commissaires assis à une table devant
Office de consultation publique de Montréal
Une consultation type se déroule généralement en 13 étapes, entre l’adoption d’une résolution mandatant l’OCPM et le dépôt du rapport au conseil municipal. Le conseil municipal ou le comité exécutif confie d’abord une mission à l’OCPM. Un avis public annonçant la consultation est publié dans les journaux et sur différentes plateformes 15 jours avant le début de la consultation. Le travail des commissaires commence lorsqu’ils sont sélectionnés pour siéger à une commission et s’étale généralement pendant une période assez intense allant de quatre à six mois, parfois plus. Le rôle des commissaires au sein d’une consultation est crucial. Comme l’affirme Dinu Bumbaru, en participant à une consultation, « on est en dialogue entre humains. Il y a des personnalités, des gens de grandes connaissances. Les commissaires sont vraiment des gens qui ont beaucoup de talent et de connaissances, qui peuvent contribuer beaucoup. Par leur écoute et leur bienveillance, ils encouragent la participation des citoyens présents ».

En commençant une consultation, les commissaires doivent prendre connaissance du dossier monté par le personnel de l’OCPM. Il est constitué de documents fournis par les promoteurs du projet ou par la Ville de Montréal et ses arrondissements. Il s’agit de descriptions du projet, de cartes, d’études d’impacts, de documents liés à la réglementation. La totalité de la documentation présentée aux commissaires est disponible au public sur le site Internet de l’OCPM et elle est accessible aux citoyens. Les commissaires rencontrent ensuite la Ville et les promoteurs, avant le début des consultations, pour expliquer le déroulement des audiences. Ils s’en tiennent alors aux questions de déroulement et attendent les audiences publiques pour entrer dans le vif du sujet, en présence des citoyens.

Les audiences

Activité avenue Mcgill 18 octobre 2018

Des tables et des kiosques se trouvent au milieu d’une rue bloquée au centre-ville. Autour d’une table, on trouve deux personnes qui placent des maquettes de bâtiments.
Office de consultation publique de Montréal
L’équipe, composée généralement de deux ou trois commissaires, d’un secrétaire de commission et d’analystes, prépare la première partie de l’audience qui consiste à informer la population et la commission sur les différents aspects du projet. Judy Gold nous confie travailler à cette étape en établissant les différents aspects du projet qui nécessitent des clarifications. Elle produit un ensemble de questions qu’elle posera à l’audience pour s’assurer que le projet est présenté avec la plus grande clarté possible. Arrive alors l’audience formelle, un moment assez protocolaire. C’est l’étape où l’information sur le projet est transmise oralement. La commission se trouve face au public, avec le promoteur d’un côté et la Ville ou l’arrondissement de l’autre. Le promoteur expose d’abord le projet, puis la Ville ou l’arrondissement complète l’exposé. Le public soumet ensuite ses questions, chaque personne peut poser deux questions et se réinscrire au registre autant de fois qu’elle le souhaite.

Pendant cette période, les commissaires, et surtout la personne qui préside, doivent gérer l’information, maintenir une bonne ambiance dans la salle, laisser la place principale au public et veiller à ce que les réponses données par le promoteur et par la Ville soient compréhensibles et ne perdent pas les citoyens dans des formalités ou détails techniques. Depuis quelques années, d’autres formes de consultation s’ajoutent à ces audiences formelles, comme des forums, des activités de cocréation ou encore des consultations en ligne. Il s’agit de différents moyens complémentaires pour atteindre un public plus large et des gens qui ne se rendent parfois pas aux audiences. Cette phase d’information a pour but de permettre aux citoyens de se renseigner et d’ainsi se forger une opinion éclairée.

La prochaine étape est l’audience d’expression des opinions. Quelques jours avant les débuts, les commissaires reçoivent les mémoires des citoyens et en prennent connaissance. Judy Gold explique qu’elle lit chaque mémoire et prépare des questions pour comprendre certains points, clarifier les interrogations s’il y a lieu, et montrer l’intérêt et la valeur que la commission accorde aux questions des citoyens. Lors de l’audience, le citoyen dispose d’environ 15 minutes pour présenter son mémoire et pour en discuter avec les commissaires. Il peut lire son mémoire ou le résumer. Selon Judy Gold, « il peut être très intimidant pour le citoyen de prendre place devant la commission, dans un environnement formel, protocolaire et souvent devant un grand auditoire. Souvent le rôle du commissaire est de créer une ambiance d’empathie, où les gens se sentiront à l’aise de s’exprimer ». Les qualités humaines des commissaires ont un rôle important à jouer pour favoriser l’expression des opinions.

Délibérations et écriture du rapport

Une fois l’audience terminée, c’est le moment des délibérations. Les membres de la commission, soutenus par les analystes, étudient les résultats de la consultation, procèdent aux arbitrages et décident de la teneur du rapport et des recommandations. Cette étape exige des commissaires, qui ont souvent des formations différentes, d’arriver à un consensus et de se mettre d’accord. Réconcilier les points de vue et énoncer les recommandations constitue parfois un bel exercice d’humilité et d’ouverture, selon Judy Gold. Le rapport est ensuite rédigé, les commissaires se répartissent la rédaction des différents chapitres et les ajustent après les relectures de leurs collègues.

À partir du moment où le rapport est envoyé aux élus, la commission est dissoute. Tout au long de la consultation, mais aussi après le dépôt du rapport, les commissaires font preuve d’un devoir de réserve et ne se prononcent pas publiquement sur les enjeux de la commission.

Le travail de commissaire à l’Office de consultation publique de Montréal

Le travail de commissaire à l’Office de consultation publique de Montréal

Témoignage de Judy Gold.

Réalisation : Marc Thomas-Dupuis

Recherche et entrevues : Annick Brabant

Durée : 4 min 26 s

2022

Références bibliographiques

OFFICE DE CONSULTATION PUBLIQUE DE MONTRÉAL. Ma ville, ma voix. 10 ans de consultations publiques auprès des Montréalais, Montréal, OCPM, 2012.

OFFICE DE CONSULTATION PUBLIQUE DE MONTRÉAL. Participation sans exclusion : rétrospective des 15 ans de l’OCPM, Montréal, OCPM, 2017.

Une série d'entrevues ont été réalisées en 2022 dans le cadre du 20e anniversaire de l’OCPM.  Les entrevues suivantes ont servi à l’écriture du présent article :

  • Isabelle Beaulieu, 26 avril 2022
  • Judy Gold, 25 avril 2022
  • Luc Doray, 25 avril 2022
  • Dinu Bumbaru, 10 mai 2022
  • Jules Patenaude, 25 avril 2022