Bruce Allan, aujourd’hui architecte associé du groupe ARCOP à Montréal, raconte la conception de certains pavillons d’Expo 67 et sa participation à leur élaboration, en tant que stagiaire.
Dans le cadre de son exposition Explosion 67, soulignant le 50e anniversaire d’Expo 67, le Centre d’histoire de Montréal a lancé un appel à tous. C’est à cette occasion que Bruce Allan a livré ce témoignage écrit et qu’il est venu rencontré un membre de l’équipe du Centre d’histoire de Montréal.
Bruce Allan 1967
Durant ma deuxième année d’études, à la fin de 1965, un professeur nous a suggéré de visiter le Musée des beaux-arts de Montréal pour y voir l’exposition des travaux de la firme Affleck, Desbarats, Dimakopoulos, Lebensold & Sise, qui deviendra plus tard ARCOP. Imaginez ma surprise lorsque j’ai constaté que la plupart des édifices contemporains montréalais qui m’avaient séduit au cours de ma première année en architecture avaient été conçus par cette firme! De plus, les rendus des pavillons thématiques étaient aussi présentés à cette exposition. Ces gens étaient absolument spéciaux!
Expo 67 - Architecture 49
Des bâtiments dépourvus d’angles droits
Expo 67 - Architecture 49
Ces structures étaient constituées de treillis assemblés avec des angles en acier Corten boulonnés et soudés, qui au fil du temps rouilleraient en adoptant un joli brun. Ils ne nécessitaient donc aucune peinture, ce qui était une bonne chose considérant qu’il s’agissait de bâtiments temporaires. Les structures en treillis étaient très populaires en architecture durant les années 1960. Elles présentaient l’avantage de se déployer sur une longue portée en plus d’offrir un espace inter-structural ouvert, permettant le passage des systèmes mécaniques et électriques sans interférence dans les espaces intérieurs. Plusieurs autres pavillons ont adopté un modèle similaire. Le plus célèbre est la sphère géodésique du pavillon américain, qui est toujours en place aujourd’hui.
Expo 67 - Architecture 49
Des centaines de « tétraèdres tronqués »
Il y avait aussi des centaines de blocs de « tétraèdres tronqués » en plastique transparent, assemblés comme des Lego pour tester des possibilités de formes. Tout était très intrigant, mais le concept de départ, le « tétraèdre tronqué », était problématique. Alors que le tétraèdre est une forme structurale rigide parfaite, si on coupe ses pointes pour créer des façades de forme hexagonales, ses propriétés structurales disparaissent et doivent alors être compensées par une panoplie d’entretoises diagonales qui atténuent grandement sa pureté. Je ne sais pas s’ils s’en étaient rendu compte avant mais, avec l’échéance très restreinte qu’on avait, il était trop tard pour changer les plans.
Expo 67 - Photo Lucie Laporte
Dans le train pour Beloeil, chaque soir, je pouvais apercevoir les treillis préfabriqués empilés le long des rives du Saint-Laurent, en attente d’être installés. Au fil de l’été, ma « maquette » prenait formait et devenait clairement visible du haut du pont Victoria.
Le design à son paroxysme
Expo 67 - (CAN-MT1967-PH-3417)
Le pavillon L’Homme interroge l’univers se trouvait sur l’île Sainte-Hélène et L’Homme à l’œuvre, sur l’île Notre-Dame. Finalement, ces pavillons ont été moins temporaires que prévu, puisque, après la fermeture d’Expo 67, le maire Drapeau a cherché à faire revivre l’exposition sous le nom de Terre des Hommes. Cela a duré quelques années, mais il était impossible de maintenir l’exposition sur une plus longue période. Plusieurs des bâtiments n’avaient pas été conçus pour supporter nos hivers et, au cours des années 1970, la plupart des pavillons ont peu à peu disparu. L’édifice L’Homme à l’œuvre était toujours debout lorsque Gilles Villeneuve a remporté le premier Grand Prix de Montréal, mais fut démantelé peu de temps après. Tout ce qu’il en reste maintenant, ce sont quelques piliers de béton qui dépassent du canal qui passait en dessous.
Bruce Allan, avril 2017
Traduction : Dominic Dagenais