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De l’avoine à l’électricité

21 janvier 2016

Pendant près d’un siècle, le tramway a rythmé les rues montréalaises. Tirés par des chevaux vers 1860, les wagons ont rapidement bénéficié de l’électricité. Ils ont cependant disparu en 1959.

Tramway - Omnibus

Vue d'un Omnibus tiré par deux chevaux avec à son bord des employés de la compagnie.
Omnibus commémoratif, Archives de la STM. Fonds de la Montreal Street Railway Company (S1/7.1).
Le transport en commun, tel que nous le concevons aujourd’hui, est né avec l’ère industrielle. De cette révolution, avec ses bouleversements technologiques et sociaux, résulte, entre autres, un développement rapide des villes. Pour desservir une population montréalaise croissante (27 000 habitants en 1831, 90 000 en 1860), la Montreal City Passenger Railway Company inaugure en 1861 un service de tramway hippomobile.

Ce type de transport avait vu le jour à New York en 1842. Compromis entre l’omnibus (voiture publique à chevaux, sur roues) et le train à vapeur, ce véhicule, tiré par deux chevaux, roulait confortablement sur des rails à 8 km/h. À Montréal, les propriétaires et conducteurs de voitures de louage manifestèrent violemment contre ce nouveau concurrent. Rien à faire, « l’ennemi » était là pour rester, soutenu à la fois par de puissants promoteurs (William Molson, William Dow et John Ostell) et par un public enthousiaste.

Des transports métamorphosés par la fée électricité

Tramway - Passage à niveau, 1893

Photographie en plongée d'un croisement de voies de tramway à l'angle de deux rues.
1893. Passage à niveau de tramway en construction, rues Sainte-Catherine et Saint-Laurent, Montréal, QC, 1893, par William Notman & Son. Musée McCord, II-102021.
Ce moyen de locomotion était assez dispendieux. En effet, 0,05 $ l’entrée représentait beaucoup pour un travailleur qui gagnait en moyenne 7 $ par semaine. En 1892, seulement 10,6 % des utilisateurs appartenaient au milieu ouvrier. Cette même année, celle de l’arrivée de l’électrification, la compagnie possédait 1000 chevaux, 150 tramways, 104 traîneaux et 49 omnibus. L’implantation de l’électricité fut extrêmement rapide. 

Déjà en 1894, les derniers chevaux retournaient brouter dans leurs verts pâturages. Liés au nouveau système, les enchevêtrements de fils au-dessus des rues donnèrent à voir aux citadins un ciel découpé en petits espaces. De nouvelles voitures, plus solides, furent introduites et, en 1905, circulait le premier véhicule public au monde où l’on payait tout de suite en entrant. Le chauffeur ne faisait plus la ronde. Il fut construit par la Montreal Street Railway Co. dans ses usines du quartier Hochelaga.

Tramway - Ligne Rosemont, vers 1950

Photographie couleur d'un tramway électrique et d'un bâtiment. La devanture du wagon affiche « ROSEMONT ».
Vers 1950, Tramway de la ligne Rosemont, Archives de la STM.
Administrée par un groupe privé, la Montreal Street Railway Co. était à la tête d’un réseau qui atteignit son sommet en 1933 avec 510 kilomètres de rails. Plus rapide et moins dispendieux que le système hippomobile, il gagna rapidement la faveur populaire (11 millions d’entrées en 1892, 107 millions d’entrées en 1914). Mais déjà se profilaient en parallèle la voiture (vers 1902) et l’autobus (en 1919) qui un jour délogèrent les « p’tits chars ». En 1959, sur le boulevard Rosemont, le dernier tramway électrique ferma la marche sur une époque désormais révolue.

Cet article est paru dans le numéro 3 du bulletin imprimé Montréal Clic, publié par le Centre d’histoire de 1991 à 2008.

Rocket, premier tramway électrique montréalais

Le 21 septembre 1892, le premier tramway électrique prenait son départ rue Craig. Le no 350, mieux connu sous le nom de Rocket, inaugurait un mode de transport qui allait, pendant 67 ans, faire partie du paysage montréalais. Construit à Saint-Louis, Missouri, par Brownell Car Company, le 350 offrit ses services jusqu’en 1914. Tout restauré, le Rocket prit part au défilé d’adieu du service de tramway de Montréal en 1959. Il fait partie, depuis 1963, de la collection du Musée ferroviaire canadien à Saint-Constant. Cette institution possède, dans sa collection de véhicules de transport urbain, 28 tramways électriques, un omnibus et un traîneau.

Le tramway adapté à l'hiver?

Tramway - Hiver 1878

Photographie d'une voiture attelée à des chevaux, en hiver.
1878, Le City Passenger Railway, Archives de la Ville de Montréal, BM042-Y-1-P1048.

Quand la blanche saison ensevelit les rails sous son duvet, le tramway à traction animale doit gagner ses quartiers d’hiver pour faire place à de lourds traîneaux. En l’absence de chauffage, les passagers grelottants tentent de se réchauffer les pieds dans la paille étendue, à cet effet, sur le plancher. Durant les demi-saisons, quand les rues se font boueuses, on utilise les omnibus.

Avec l’électrification du transport, apparaissent les grattoirs amovibles à l’avant des véhicules et les voitures-balais. On utilise aussi du sel pour dégager les rails. Cela blesse les chevaux aux sabots et aux mollets et hérisse les commerçants qui voient leurs parquets ruinés. Les tramways fonctionnent désormais toute l’année. Ils sont équipés de chaufferettes, qui passeront vite du charbon à l’électricité.

Et c’est ainsi que les Montréalais, dans un confort bien relatif, se déplaçaient pendant la frileuse saison...

Références bibliographiques

COURCY-LEGROS, Louiselle. Les p’tits chars. Évolution historique du transport en commun à Montréal, Québec, Transport 2000, 1985, 23 p.

PHARAND, Jacques. À la belle époque des tramways, Montréal, Les Éditions de l’Homme, 1997, 280 p.