Au début du XXe siècle, les Montréalais raffolent des « vues animées », malgré les réprimandes du clergé. Cet engouement pour le cinéma ne sera pas étouffé et persistera.
Cinéma - Palace Theatre
C’est dans les parcs d’attractions que l’on peut les voir au début du XXe siècle. Souvent colorés à la main, ces films de cinq minutes sont alors présentés à titre de curiosité, comme les tours de force de Louis Cyr et les concerts de fanfare. En ce temps-là, les Montréalais fréquentent avec assiduité le parc Sohmer pour assister aux projections de Marie d’Hauterives, la Comtesse des vues animées, et de son fils, le Vicomte Henry. Ceux-ci présentent des bandes des frères Lumières, de Méliès et de Pathé.
L’intérêt grandissant qui est témoigné au cinéma amène la jeune industrie à s’organiser. Vers 1907, les projectionnistes quittent les parcs pour s’installer dans les salles. Les « p’tites vues » sont dès lors présentées dans les théâtres, pendant les entractes ou comme complément de vaudevilles. À partir de 1915, le cinéma devient une attraction principale. Les gens investissent alors abondamment les salles de cinéma, que l’on nomme les « scopes ».
À chacun son spectacle
Rudolph Valentino - Photoplay Magazine
Le clergé catholique ne reste pas indifférent à ce phénomène. L’élite cléricale engagera une lutte acharnée contre les propriétaires de « scopes » qui opèrent le dimanche. Selon eux, les « vues animées » sont truffées de scènes déplacées et suggestives, en plus d’être projetées dans des lieux dangereusement obscurs... À cet effet, on prépare un décret pour que les séances soient présentées dans des salles semi-éclairées... Mgr Bruchési déclare même qu’il « bénirait le législateur qui décréterait l’abolition des théâtres de vues animées »! Peine perdue toutefois pour l’archevêque : le gouvernement d’Alexandre Taschereau recule devant la popularité du cinéma. L’interdit n’irait pas sans lui coûter beaucoup d’électeurs et d’argent en taxe.
Cinéma - Laurier Palace après incendie 1927
Cet article est paru dans le numéro 20 du bulletin imprimé Montréal Clic, publié par le Centre d’histoire de 1991 à 2008.