Les berges de l’île de Montréal ont été grandement transformées par le développement portuaire et l’urbanisation. Des pressions citoyennes ont toutefois permis d’en revitaliser certaines portions.
Située au cœur de l’archipel d’Hochelaga, l’île de Montréal comprend 266,6 km de berges, réparties le long du Saint-Laurent, du lac Saint-Louis et de la rivière des Prairies, auxquelles s’additionnent les berges des autres îles comprises dans le territoire municipal, notamment l’île Sainte-Hélène et l’île Bizard.
Un port en expansion
Les berges vers 1830
Au début des années 1830, la Commission du havre, nouvellement créée, fait construire plus de 1143 mètres de quais de bois permanents et un mur de soutènement de pierre le long de la rue des Commissaires. L’îlot Normand est aussi rattaché à la rive, faisant disparaître l’embouchure de la rivière Saint-Pierre.
L’expansion du port se poursuit au cours des décennies suivantes et de nouveaux quais sont construits toujours plus à l’est. Au début du XXe siècle, c’est l’ensemble des berges s’étendant de Pointe-Saint-Charles à Longue-Pointe qui se trouvent ainsi occupées par des installations portuaires.
Contrer les inondations
Lac Saint-Louis
Ailleurs sur l’île, diverses digues sont également érigées le long des secteurs névralgiques. C’est notamment le cas à Verdun où une digue est aménagée en 1896 et rehaussée à diverses reprises jusqu’en 1915. Une promenade en bois en recouvre une portion. Lors de la prolongation du métro à Verdun, dans les années 1970, une partie de la terre excavée sera déversée le long de la rive et à l’île des Sœurs, rehaussant davantage les berges.
Urbanisation et étalement urbain
Berge de la rivière des Prairies vers 1950
Au début du XXe siècle, le développement du réseau de tramway et l’implantation d’institutions telles que la prison de Bordeaux, l’hôpital du Sacré-Cœur ou encore le parc Belmont accéléreront l’urbanisation du territoire longeant la rivière. Puis, la construction, à la fin des années 1920, du barrage et de la centrale hydroélectrique, à la hauteur de l’île de la Visitation, transforme considérablement les berges et les rapports des riverains avec la rivière. La mise en activité du barrage aggrave la pollution de la rivière des Prairies, qui est déjà préoccupante. En effet, en modifiant le débit de la rivière, le barrage retient le long des rives les eaux usées qui s’y déversent. Il provoque également des inondations dans les secteurs en amont. Les nombreuses plaintes adressées par des résidants forceront la Montreal Island Power Company, propriétaire du barrage, à réajuster le débit de la rivière.
Du côté du lac Saint-Louis, le paysage agricole disparaît lui aussi peu à peu au profit de la banlieue. À l’ouest de Lachine, des maisons résidentielles, souvent cossues, sont érigées tout le long du « lakeshore » et les berges sont rehaussées afin de prévenir les débordements. Déjà en branle dans les années 1920 et 1930, la croissance de la banlieue s’intensifie après la Deuxième Guerre mondiale. L’occupation de la rive par une succession de propriétés privées limite ainsi l’accès au lac pour les autres résidants de l’ouest de l’île, qui doivent se contenter des fenêtres offertes par quelques parcs et marinas.
Les joies de la baignade
Plage 1937
Interdite depuis le début du XIXe siècle dans le secteur portuaire, la baignade dans les eaux du fleuve connaît pour sa part un bref regain grâce à l’inauguration de la plage de l’île Sainte-Hélène en 1937. La plage devient un lieu fort prisé des familles montréalaises, qui profitent de l’accès à l’île facilitée par le pont Jacques-Cartier, inauguré en 1930, pour pique-niquer sur la plage et se baigner dans les eaux du fleuve. Malgré sa popularité, la plage disparaîtra lors de l’aménagement du site d’Expo 67, qui transformera radicalement l’île et ses berges.
La reconquête des berges
Berges
Les autorités municipales saisissent ainsi l’occasion et récupèrent dans les années 1980 une partie des rives occupées par des usines désaffectées pour ouvrir des percées sur le fleuve. Les berges du canal Lachine sont réhabilitées et une série de parcs riverains sont aménagés sur tout le pourtour de l’île. En 2019, l’inauguration d’une plage publique à Verdun rend de nouveau possible la baignade dans les eaux du fleuve. Une autre plage devrait également voir le jour dans les prochaines années à Pointe-aux-Trembles.
DAGENAIS, Michèle. Montréal et l’eau : Une histoire environnementale, Montréal, Boréal, 2011, 306 p.
VILLE DE MONTRÉAL. Le parcours riverain. Une route historique riveraine de 180 km à Montréal.
PLOURDE GARANT, Marguerite. La rivière des Prairies de 1500 à nos jours, Montréal, Maison Scribec, 1986, 160 p.
VÉZINA, Denis. Le site des moulins : Parc-nature de l’Île-de-la-Visitation. Guide d’interprétation, Montréal, Cité Historia – Communauté urbaine de Montréal, 1998, 44 p.