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Honoré Beaugrand

05 février 2016
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Homme de presse, Honoré Beaugrand devient maire de Montréal en 1885. Il s’attaque tout d’abord à la situation sanitaire critique de cette ville « crasseuse », où le risque d’épidémie est bien réel.

Honoré Beaugrand

Le maire Honoré Beaugrand vers 1887 affublé de médailles et d’un costume d’apparat.
Vers 1887. Honoré Beaugrand. Archives de la Ville de Montréal, BM1, S5, P111-3.
Lorsqu’il devient maire de Montréal, le 2 mars 1885, Honoré Beaugrand a 36 ans. Né le 24 mars 1848 dans une famille influente de Lanoraie, il envisage d’abord de faire carrière en religion, mais il quitte le noviciat avant de prononcer ses vœux. Quelques années plus tard, Honoré fréquente la première école d’officiers établie à Montréal au marché Bonsecours et il rejoint l’armée française qui combat les forces révolutionnaires au Mexique. Établi aux États-Unis pendant plus de sept ans (1871-1878), Honoré Beaugrand y fonde plusieurs journaux de langue française et veille aux intérêts des membres de la communauté canadienne-française. Le 5 octobre 1873, il épouse Eliza Walker, une Américaine protestante d’origine modeste. De retour à Montréal, il fonde en 1879 le journal La Patrie qui devient l’organe des libéraux de Montréal.

En 1885, l’éditeur de La Patrie brigue la mairie de Montréal et il remporte l’élection loin devant le maire sortant Jean-Louis Beaudry. Il met un terme à une tradition tacite établie depuis plusieurs décennies voulant l’alternance entre francophones et anglophones à la mairie de la ville. La population anglo-protestante s’est rangée derrière lui et on le qualifie de « maire des Anglais ».

Corriger une situation sanitaire critique

Honoré Beaugrand - La Patrie

Premier numéro du journal La Patrie (24 février 1879).
Détail de la une du journal La Patrie, 1re année, no 1, 24 février 1879, Bibliothèque et Archives nationales du Québec. Cote : 669 JOU.

Nouvellement élu, le maire Beaugrand s’attaque à la réforme de la présentation du budget, il se préoccupe de l’embellissement des rues et de l’éclairage, il s’assure de l’efficacité du service de canalisation des eaux, de l’aide aux victimes d’inondation ainsi que de la réforme en profondeur du département d’hygiène de la ville. Le premier mandat d’Honoré Beaugrand est marqué par la situation sanitaire critique qui règne à Montréal. Selon plusieurs médecins de l’époque, Montréal est une ville malpropre, voire « crasseuse », rendue plus répugnante encore par les déchets et les excréments d’animaux qui empoisonnent l’air. Il ne fait aucun doute aux yeux du maire : les services sanitaires de la ville doivent être réformés, le risque d’épidémie est bien réel. Au printemps 1885, une épidémie de variole s’abat sur la ville. Honoré Beaugrand mène un combat acharné en faveur de la vaccination, mais il peine à convaincre les Canadiens français, dont plusieurs sont ouvertement hostiles à cette mesure. Plus de 3000 Montréalais succombent à la maladie en 1885.

Une autre crise trouve des échos dans la ville au même moment : la révolte des Métis dans l’ouest du pays. Si Honoré Beaugrand soutient le déploiement militaire à ses débuts et s’il fait entériner une résolution au conseil municipal afin d’appuyer le gouvernement conservateur dans sa répression de la rébellion, son point de vue change à la suite de l’exécution du chef des Métis, Louis Riel. Ce dernier est francophone et il a été éduqué au Québec. Le maire dénonce alors le crime judiciaire commis contre Riel et s’insurge contre sa pendaison.

Accroître les services municipaux

Honoré Beaugrand - Conseil municipal 1885

Photographie composite des membres du conseil municipal et leur portrait.
Conseil municipal de Montréal, QC, photographie composite, 1885, copie réalisée en 1887, par William Notman & Son, Musée McCord, II-85064.
Porté au pouvoir pour un second mandat, Honoré Beaugrand s’attaque à la gestion de la ville. Il veille à l’extension du système d’aqueduc, œuvre à l’annexion du village de Saint-Jean-Baptiste, acquiert un terrain pour les abattoirs, crée de nouveaux postes de police, travaille au pavage des rues, subventionne un nouvel hôpital et instaure l’incinération des ordures ménagères. En 1887, il sort de l’arène municipale en ne se représentant pas à la mairie. John Joseph Caldwell Abbott lui succède.

Affaibli par ses crises d’asthme et par son emphysème, Honoré Beaugrand consacre les années qui suivent à son travail d’éditeur, à l’écriture ainsi qu’aux voyages. Bibliophile, il possède alors une belle collection de livres anciens et rares et publie ses propres travaux, dont son recueil La Chasse-Galerie. Il s’éteint en 1908 et son corps est incinéré. Cette pratique est alors interdite par l’Église catholique qu’il a répudiée. Il est enterré au cimetière du Mont-Royal, là où son épouse Eliza sera aussi enterrée en 1934.

Références bibliographiques

MARSOLAIS, Claude-V., Luc DESROCHERS et Robert COMEAU. Histoire des maires de Montréal, Montréal, VLB éditeurs, 1993, p. 126-132.

RICARD, François. « Beaugrand, Honoré », Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13, Université Laval, University of Toronto, 2002.

WARREN, Jean-Philippe. Honoré Beaugrand, La plume et l’épée (1848-1906), Montréal, Boréal, 2015.