Monsieur Birch était un skieur convaincu et convaincant. À la fin du XIXe, cet immigrant norvégien a effectué le trajet Montréal-Québec sur deux lames de bois, et a ainsi popularisé le ski.
Ski - Courrier du Canada, 14 février 1879
« Pour ce que nous avons vu sous les pieds de Birch, nous brisons notre plume si cela ressemble à des raquettes et en mérite le nom. […] Figurez-vous deux lames de bois de 9 pieds de long sur 4 pouces de large, relevées aux extrémités, rien de plus. » (Le Courrier du Canada, 14 février 1879)
C’est ainsi que Le Courrier du Canada décrit la paire de skis que porte un dénommé A. Birch en 1879. Cette année-là, en janvier, Birch attire l’attention médiatique puisqu’il compte entreprendre un courageux voyage de Montréal à Québec sur ces « lames de bois », que les journalistes de l’époque appellent aussi « raquettes norvégiennes ». M. Birch veut ainsi prouver que son moyen de transport est très rapide et efficace. Les sceptiques sont nombreux : à l’époque, les raquettes représentent le moyen de transport hivernal le plus populaire. Certains doutent même que M. Birch arrive à Québec en vie : avant de partir de Montréal, on lui aurait conseillé de faire son testament! La route prévue est en effet dangereuse. Empruntant l’ancien chemin du Roy, au nord du fleuve Saint-Laurent, Birch doit souvent traverser des rivières aux glaces incertaines et passer par de longs segments inhabités.
L’expédition périlleuse de Monsieur Birch
Ski
A. Birch demeure énigmatique : son nom semble impossible à retracer dans les différents recensements. Toutefois, on apprend des journaux qu’il est un immigrant norvégien, résidant à Montréal en 1879. Il fait vraisemblablement partie d’une communauté norvégienne restreinte qui se forme à la fin du XIXe siècle. Certains d’entre eux travaillent dès les années 1850 sur la construction du train Montréal-Portland. La présence scandinave à Montréal est en outre chiffrée dans un recensement de 1891. On note que 270 Norvégiens habitent la métropole, aux côtés de 157 Suédois et de 112 Danois. Quelques Scandinaves résident aussi à l’extérieur des limites de la ville de l’époque, notamment dans des quartiers du sud-ouest comme la Petite-Bourgogne ou Saint-Henri.
Un nombre grandissant d’adeptes
Ski - remonte-pente 1955
Si le ski est d’abord pratiqué par les Scandinaves et certains membres de la communauté anglophone montréalaise, le sport gagne rapidement en popularité et attire un nombre grandissant d’adeptes. La pratique du ski se propage alors dans d’autres régions du Québec. Les nouvelles liaisons ferroviaires entre Montréal et les Laurentides vont, par exemple, permettre aux skieurs de découvrir la région et ses montagnes. D’ailleurs, on doit plusieurs sentiers de ski et connexions entre villages laurentiens à un autre immigrant norvégien, Herman Smith-Johanssen (1875-1987), qui en organise l’aménagement dans les années 1930.
Au milieu du XXe siècle, on peut même pratiquer le ski alpin à Montréal! Ainsi, de 1944 à 1979, un monte-pente est mis en fonction sur le mont Royal. Les skieurs peuvent plus facilement accéder aux pentes situées derrière l’Université de Montréal, un site très populaire à l’époque. D’autres choisissent plutôt la piste du Lac-aux-Castors, jusqu’à sa fermeture dans les années 1980.
BÉLEC, Pierre, et Paul LARUE. Le Québec en plein air, Montréal, Québec-Amérique, 2016, 306 p.
CHABOT, Denis. « Les Laurentides, berceau du ski : la rencontre de deux mondes », Histoire Québec, vol. 13, no1, 2007, p. 21-27.
TINDALE, William. « Le ski à travers les âges », Cap-aux-Diamants, no 24, 1991, p. 64-66.