L’Office de consultation publique de Montréal : 20 ans de participation citoyenne
En janvier 2002, l’Office de consultation publique de Montréal voit le jour au même moment que la nouvelle Ville de Montréal.
OCPM 2020
L’organisme reçoit le mandat de mener des consultations publiques, qui lui est remis par le conseil municipal ou le comité exécutif de la Ville. Ces missions touchent surtout des projets en urbanisme ou en aménagement du territoire qui relèvent de la Ville, mais l’OCPM a aussi la tâche de mettre en place des mécanismes de consultation crédibles, transparents et efficaces. Certains projets liés à l’urbanisme ou à l’aménagement doivent obligatoirement faire l’objet de consultations devant l’OCPM, on parle alors d’objets statutaires.
Les premières années
OCPM 2002
En décembre 2003, la loi 33, qui approuve la dévolution de pouvoirs aux arrondissements, est adoptée. Beaucoup plus large que le mandat de l’OCPM, la portée de cette loi tend à accorder moins de pouvoir à la ville centre et davantage aux structures locales. Alors que la totalité des amendements apportés au plan d’urbanisme devait auparavant faire l’objet d’une consultation devant l’OCPM, la loi 33 autorise de ne plus passer devant cet organisme pour faire de telles modifications. Ceci répond aux demandes des anciennes villes de banlieue qui désiraient moins d’interventions de la ville centre dans leurs dossiers. En 2008, une modification reviendra partiellement sur cette disposition.
Tout au long de son mandat de quatre ans, Jean-François Viau s’efforce d’établir clairement l’indépendance de l’OCPM devant les autorités politiques. Si les bureaux de l’OCPM sont d’abord logés près de l’hôtel de ville, dans la rue Gosford, puis dans la rue Saint-Antoine, ils sont relocalisés en 2003 dans la rue Metcalfe, près des cours Mont-Royal, à distance du pouvoir politique. Selon Luc Doray, il était primordial, notamment par ce geste, d’établir cette indépendance, qui est à la base même de la mission de l’OCPM.
Un organisme en constante adaptation
OCPM 2017
Pendant ses 20 années d’existence, les méthodes de l’OCPM évoluent considérablement, dans l’objectif de toucher de nouvelles personnes. L’organisme développe ses méthodes de participation en ligne, mais il se rend aussi dans les quartiers pour préparer en amont les citoyens à la consultation. À ce sujet, Judy Gold, commissaire à l’OCPM, tient les propos suivants : « Quand j’ai commencé à travailler à l’Office en 2004, on a commencé à diversifier nos méthodes de consultation. Pour rejoindre des populations qui traditionnellement n’assistaient pas aux audiences formelles et aussi pour enrichir la réflexion des citoyens avant qu’ils viennent déposer leur mémoire devant la commission. Souvent on ajoutait des groupes focus. Des fins de semaine, de temps en temps, on organisait [des activités] dans un centre communautaire dans le quartier où se trouvait le projet, on invitait les citoyens à venir voir les maquettes ou les plans de projet, à discuter avec les promoteurs puis avec d’autres membres de leur communauté dans un cadre très informel. Lors de la consultation sur l’aménagement de l’entrée Peel, [...] on a installé, deux dimanches pendant le mois de septembre, une tente sur la montagne, juste à côté de la clairière. C’était pour rejoindre les usagers du parc qui étaient notamment les personnes immigrantes et les membres des communautés culturelles. »
La diversification des méthodes de consultation permet d’entrer en contact avec un plus grand nombre de personnes. La création d’une halte-garderie, l’alternance entre hommes et femmes au moment des périodes de questions et la possibilité de prioriser les parents lors des audiences font en sorte qu’un plus grand nombre de femmes se fait entendre. L’OCPM atteint 49 % de participation féminine juste avant le début de la pandémie de la COVID-19, un record dans son histoire.
Urbanisme, aménagement, environnement, vision
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En 2016, l’OCPM publie le Guide montréalais sur les suivis. Bien que le suivi de ses recommandations après le dépôt de son rapport ne fasse pas partie du mandat de l’organisme, le document informe les citoyens sur les meilleurs moyens de connaître l’évolution des projets après les consultations, une façon de constater l’influence de leur participation. Les arrondissements mettent aussi de l’avant des mécanismes qui permettent à l’ensemble des Montréalaises et des Montréalais d’en être mieux informés. Comme en témoigne Luc Doray, secrétaire général de l’OCPM, il était primordial d’établir « des mécanismes, [gérés] par les arrondissements et le central, pour s’assurer que les suivis donnés [aux] recommandations [de l’OCPM] soient connus. » Il ajoute : « C’est fondamental, on l’a souvent répété, et je dirais que maintenant c’est assez acquis dans les pratiques des arrondissements. Les citoyens viennent de bonne foi devant nous, prennent du temps pour lire la documentation, poser des questions, écouter, écrire un mémoire ou le présenter verbalement. […] L’important n’étant pas que la Ville retienne l’ensemble des recommandations de l’Office, mais que la Ville dise [telle] recommandation, on la retient pour telle raison. [Une autre n’est pas retenue] pour telle raison, et ainsi de suite. C’est un acquis fragile qu’il faut conserver et sur lequel il faut continuer à travailler. »
Par son processus neutre et rigoureux, l’OCPM donne une voix à l’ensemble des citoyens qui s’impliquent dans les consultations. Il favorise la cohésion sociale, en encourageant la discussion et l’information. Il contribue aussi à montrer, comme l’affirme Dinu Bumbaru, que « la démocratie ne s’exerce pas seulement le jour du vote. Qu’il y a une démocratie participative, une démocratie délibérante où les gens échangent des idées! » Selon lui, « à travers l’Office, on a également une pédagogie collective des enjeux, et c’est très important ». Pilier important de la démocratie montréalaise, l’Office de consultation publique de Montréal permet aux Montréalaises et aux Montréalais de sentir qu’ils ont la possibilité de s’informer et de se prononcer à propos des grands enjeux qui secouent la ville.
OFFICE DE CONSULTATION PUBLIQUE DE MONTRÉAL. Ma ville, ma voix. 10 ans de consultations publiques auprès des Montréalais, Montréal, OCPM, 2012.
OFFICE DE CONSULTATION PUBLIQUE DE MONTRÉAL. « Le mont Royal, une richesse collective », Les cahiers de l’OCPM, vol. 3, no 1, Montréal, OCPM, 2012.
OFFICE DE CONSULTATION PUBLIQUE DE MONTRÉAL. Le guide montréalais sur les suivis, Montréal, OCPM, 2012.
OFFICE DE CONSULTATION PUBLIQUE DE MONTRÉAL. Participation sans exclusion : rétrospective des 15 ans de l’OCPM, Montréal, OCPM, 2017.
PARÉ, Jean. « Chapitre 7. Le rôle de l’Office de consultation publique de Montréal », Renouveler l’aménagement et l’urbanisme : Planification territoriale. Débat public et développement durable, Montréal, Presses de l’Université de Montréal, 2008 (généré le 22 avril 2022), p. 201-219.
Une série d'entrevues ont été réalisées en 2022 dans le cadre du 20e anniversaire de l’OCPM. Les entrevues suivantes ont servi à l’écriture du présent article :
- Isabelle Beaulieu, 26 avril 2022
- Judy Gold, 25 avril 2022
- Luc Doray, 25 avril 2022
- Dinu Bumbaru, 10 mai 2022
- Jules Patenaude, 25 avril 2022