Pour contrer l’épidémie de variole qui sévit à Montréal en 1885, le maire Honoré Beaugrand incite la population à se faire vacciner, mais cette idée suscite appréhensions et polémiques.
Honoré Beaugrand
Cette résistance à la vaccination s’appuie sur plusieurs croyances. Un précédent foyer de variole avait déjà été vaincu sans avoir recours à la vaccination. De plus, l’idée circulait que les risques de la vaccination étaient plus grands que les avantages qui y étaient associés. La pensée d’empoisonner l’organisme d’un enfant sain en lui inoculant le virus d’une maladie dangereuse semblait outrageuse. Enfin, l’Église s’opposait au départ à ce que les autorités laïques prennent le contrôle de la gestion de la contagion et encourageait les catholiques à ne pas laisser l’État intervenir dans la sphère privée. Plusieurs catholiques exprimaient la conviction que ni les médecins, ni la vaccination ne pouvaient empêcher Dieu de venir chercher ceux dont l’heure était venue. Parmi les francophones opposés à la vaccination, d’éminents docteurs, tel Joseph Émery Coderre, dénoncent les dangers qu’ils associent à celle-ci, ce qui ne fait qu’amplifier le mouvement de rejet.
Blâme, méfiance et négligence
Variole, incident en 1885
Les anglophones de la ville, quant à eux, sont généralement plus favorables à la vaccination et ils blâment les francophones pour la propagation de la maladie. La vaccination est, à leurs yeux, essentielle afin de freiner la transmission de la variole. Craignant que l’on emporte les malades et redoutant l’exclusion, plusieurs familles canadiennes-françaises hésitent à déclarer les cas de variole. Les précautions nécessaires pour éloigner les malades du reste de la population sont négligées.
Devant la progression de l’épidémie, les médecins vaccinateurs sont accompagnés de policiers pour obliger les Montréalais à se faire vacciner. L’évêque de Montréal, Mgr Fabre, accepte de se faire vacciner deux fois pour inciter ses fidèles à accepter la mesure. Le maire Beaugrand, qui défend la vaccination, reçoit des menaces de mort et des émeutes surviennent. En novembre 1885, l’épidémie recule. Nombreux sont ceux qui reconnaissent le travail du maire afin de freiner l’épidémie.
MARSOLAIS, Claude-V., Luc DESROCHERS et Robert COMEAU. Histoire des maires de Montréal, Montréal, VLB éditeurs, 1993, p. 126-132.
RICARD, François. « Beaugrand, Honoré », [En ligne], Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13, Université Laval, University of Toronto, 2002. [http://www.biographi.ca/fr/bio/beaugrand_honore_13F.html] (Consulté le 18 janvier 2016)
WARREN, Jean-Philippe. Honoré Beaugrand, La plume et l’épée (1848-1906), Montréal, Boréal, 2015, 532 p.