Avec des précipitations de 43 centimètres de neige en 24 heures et de forts vents qui ont paralysé la métropole pendant près d’une semaine et forcé les services d’urgence à demander l’aide des motoneigistes, la tempête du 4 mars 1971 a acquis de manière spectaculaire son titre de tempête du siècle!
Coiffée d’un journal, une jeune dame tente de se protéger du vent en retournant à son domicile sur l’avenue Maplewood (maintenant Édouard-Montpetit). Dans la soirée du 3 mars 1971, la neige commence à tomber sous les yeux des citadins déjà éprouvés par un hiver difficile. Le matin du 4 mars, les Montréalais partent au travail malgré la poudrerie, sans se douter de toutes les peines qui les attendent. La neige tombant en abondance est emportée par un vent soufflant de plus en plus fort, atteignant 108 km/h dans certains secteurs. Sortir devient dangereux pour les jeunes enfants qui sont presque emportés par le vent. Nombre de travailleurs doivent se résoudre à dormir sur leur lieu de travail. Les hôtels sont bondés de voyageurs, partageant les chambres à plusieurs afin de ne laisser personne dans le froid. Les écoles, les magasins, les usines, même les journaux, cessent leurs activités le 4 et le 5 mars 1971. Le déneigement a à peine commencé qu’une autre tempête frappe le 7 mars. Le maire Jean Drapeau incite les Montréalais à rester avec leur famille pendant près… d’une semaine!
Des transports paralysés
Le bus de la Commission de transport de la communauté urbaine de Montréal (CTCUM), que l’on voit sur la photographie, tente de circuler dans une rue encombrée de neige. Le soir du 4 mars 1971, certains passagers passent même la nuit sur le plancher de l’autobus! Le réseau routier est paralysé par les forts vents et les 50 centimètres de neige qui sont tombés. Les ponts sont fermés. Aucun avion ne décolle de l’aéroport Dorval. À la demande des policiers et des ambulanciers, les motoneigistes viennent en aide aux citadins. À travers le blizzard, ils circulent dans les rues, apportant des vivres aux familles isolées, amenant les patients en urgence à l’hôpital et secourant les automobilistes immobilisés dans la tempête. Malgré ces secours, 17 personnes décèdent durant la tempête, de crise cardiaque ou de froid et d’asphyxie dans leur voiture ensevelie sur l’autoroute. Devant l’urgence de la situation, le métro fonctionne exceptionnellement toute la nuit pour aider les gens à retourner à la maison. Pour les courageux, la marche est de mise. Une jeune femme travaillant chez Woolworth, au coin de Sainte-Catherine et McGill College, met près de trois heures à retourner chez elle une fois sortie du métro Beaubien!
Près de 4 mètres de neige à l’hiver 1970-1971
Depuis décembre 1970, près de 2,8 m de neige sont tombés sur la métropole. Début mars 1971, le budget de déneigement de la Ville excède déjà les prévisions de 3,5 millions. Hormis à LaSalle, où la neige est jetée dans le fleuve (une pratique depuis interdite), ou à Outremont, où les machines à fondre la neige fonctionnent 24 heures sur 24, Montréal et les villes environnantes sont déjà ensevelies à la veille de la tempête. S’accumulant en immenses congères devant les habitations, les précipitations forcent la condamnation de certaines ruelles à Verdun, empêchant les livraisons de mazout. La tempête amène 54 centimètres supplémentaires, ce qui en fait la quatrième tempête la plus importante du XX
e siècle, après celles de 1954, 1955 et 1969. Toutefois, la rigueur de l’hiver 1970-1971, l’intensité des chutes de neige (43 centimètres dans la seule journée du 4 mars) et les forts vents ont frappé l’imaginaire des Montréalais. Seuls l’hiver très neigeux de 2007-2008 et la tempête du 27 décembre 2012 offrent des comparatifs à ceux et celles qui n’ont pas vécu la fameuse tempête du 4 mars 1971!
Cet article est paru dans la chronique « Montréal, retour sur l’image », dans le Journal de Montréal du 10 janvier 2016.