La rue Sainte-Catherine et ses intersections

De l’avenue Papineau à la rue Notre-Dame Est

La rue Sainte-Catherine vers l'est à partir de la rue Dorion, 1963,VM94,A103-002.Dans ce secteur, la rue Sainte-Catherine est une voie privée à la fin du XVIIIe siècle. Elle apparaît par petits tronçons entre le chemin Papineau (devenu avenue) et la rue Dufresne. En 1864, elle est acquise par la Ville pour permettre son ouverture complète. Puis, elle est prolongée jusqu’à la rue du Havre dans la décennie suivante. On en retrouve également de courtes sections dans le quartier d’Hochelaga, à l’intersection de la rue Dézéry et dans la Ville de Maisonneuve vis-à-vis l’avenue Jeanne-d’Arc; elles sont ensuite prolongées pour former une voie continue. En 1913, celle-ci atteint la rue Vimont. Puis, en 1957, des expropriations sont réalisées afin de construire un petit segment orienté vers le sud, en direction de la rue Notre-Dame Est.

À la fin du XIXe siècle, quelques bâtiments jalonnent la voie entre l’avenue Papineau et la rue Frontenac. Par la suite, le développement de la rue se fait rapidement puisque dès le début du XXe siècle, elle est entièrement bâtie jusqu’à la rue Cuvillier. Dans les années 1920, tous les lots sont construits.

La rue Sainte-Catherine vers l'ouest, à partir de la rue Préfontaine, 1926,VM98,SY,D2,P034.Entre l’avenue Papineau et les voies du Canadien Pacifique, la rue traverse le quartier Sainte-Marie où se trouve l’une des plus importantes concentrations industrielles de la ville. Une population ouvrière nombreuse vient habiter les environs. La rue traverse ensuite le Village d’Hochelaga (1870) qui devient lui aussi industriel et ouvrier. L’installation, au début des années 1880, de la cour de triage du Canadien Pacifique crée une coupure dans ce secteur. Les liens sont rétablis en 1892 avec la construction du pont ferroviaire de la rue Sainte-Catherine par la compagnie Montreal Street Railway. Détruit dans un incendie, le pont est reconstruit en 1903. Il a alors une voie double pour les tramways et offre un accès aux voitures et aux piétons. Hochelaga est annexée à Montréal en 1883, mais sa partie est se sépare pour former la Ville de Maisonneuve (1883-1918) qui devient à son tour un important centre industriel. L’extrémité est de la rue se trouve dans Longue-Pointe (Village, puis Ville), annexée à Montréal en 1910.

Ce secteur regroupe plusieurs établissements religieux. Un grand complexe institutionnel se développe entre les rues Dufresne et Fullum. Le bâtiment le plus ancien est le pensionnat Sainte-Catherine de la Congrégation de Notre-Dame de Montréal qui ouvre ses portes en 1881. Les sœurs de la Providence transfèrent leur maison mère, située à l’angle de la rue Saint-Hubert, dans un nouvel immeuble en 1888. En 1894, l’hospice Gamelin est construit sur la rue Dufresne. En 1928, on y érige l’église Saint-Vincent-de-Paul qui remplace le bâtiment de 1878. Plus à l’est, entre les rues Joliette et Nicolet, le couvent d’Hochelaga des Sœurs des Saints-Noms de Jésus et Marie est inauguré en 1860 et sera démoli en 1971. À l’extrémité est du segment, on établit, en 1880, un hospice protestant, le Old People’s Home (devenu le George Moore Memorial Home, puis le centre de soins prolongés Grace Dart).

Les quartiers Sainte-Marie et Hochelaga se développent grâce à l’installation de grandes usines, dont quelques-unes se trouvent à proximité de la voie. Ainsi, la famille Galibert installe, près de l’avenue De Lorimier, une importante tannerie (1863-1940). À l’angle de la rue Parthenais, l’entreprise Dominion Oil Cloth & Linoleum s’installe en 1872. En 1929, un édifice administratif, de style Art déco, est ajouté à l’usine. Dans les années 1960, la compagnie change de nom pour Domco avant de déménager son siège social. L’édifice est depuis transformé en immeuble de bureaux. Tout près, des locomotives sont assemblées aux ateliers De Lorimier du Canadien Pacifique de 1883 à 1904. La compagnie déplace ensuite sa production aux ateliers Angus. Le bâtiment est repris en 1906 par Carter White Lead (devenue Carterchem). Il est détruit par un incendie en 1999, laissant un grand terrain vague à décontaminer.

La rue Sainte-Catherine sous le pont Jacques-Cartier, vers 1960,VM94,Em1-001.La proximité de plusieurs infrastructures de transport, tels le port et les voies ferrées, profite aux entreprises. Le Canadien Pacifique installe sa cour de triage Hochelaga au début des années 1880. Le pont du Havre (devenu Jacques-Cartier), inauguré en 1930, marque le paysage du secteur et entraîne de nombreuses expropriations. Le tablier du pont passe au-dessus de la rue et deux piliers sont érigés de part et d’autre. Près de la rue Moreau se trouve la gare du même nom du Canadien Nord (devenu Canadien National) ouverte en 1903. Jusqu’en 1946, elle accueille des passagers en provenance de Lanaudière, de la Mauricie, du Saguenay–Lac-Saint-Jean et de l’Abitibi, ce qui amène de nombreux commerçants et hôteliers dans le secteur.

Dans ce segment, la rue Sainte-Catherine est une voie commerciale de quartier dès la fin du XIXe siècle. Les immeubles sont, pour la plupart, occupés par des magasins aux rez-de-chaussée et des logements aux étages supérieurs. La forte population ouvrière explique la présence dans les années 1950 de nombreux restaurants, bars, tavernes et salles de billard. La plus importante concentration commerciale se trouve dans Maisonneuve, entre l’avenue Bourbonnière et la rue Viau. En 1983, ce secteur est désigné par le nom de Promenade Sainte-Catherine Est.

En plus des vocations industrielles et commerciales, cette portion de la rue a aussi une fonction récréative. Au début du XXe siècle, la patinoire Jubilee est située à l’angle de la rue Marlborough (devenue Alphonse-D.-Roy). L’équipe de hockey Le Canadien y joue en 1909 et de 1918 à 1920. Le cinéma Laurier Palace ouvre près de la rue Dézéry en 1912. Il est tristement connu pour l’incendie qui coûte la vie à 78 enfants, en 1927. Il est, depuis, remplacé par une église, occupée par diverses confessions. Le théâtre Granada, ouvert en 1930 près de l’avenue Morgan, est restauré en 1977 pour y accueillir le théâtre Denise-Pelletier. Près de l’avenue De La Salle, le cinéma Théâtre Odéon Mercier ouvre en 1948 et ferme ses portes dans les années 1980. Vue intérieure du théâtre Granada (devenu Denise-Pelletier), vers 1970, VM6, R3153-2 (4353E).Entre 1937 et 1952, le Rand’s Café propose repas et musique à ses clients. Plus à l’ouest, le cinéma Champlain est lui aussi inauguré en 1948. Quelques espaces publics sont aménagés le long de la voie. Sur d’anciens terrains du Canadien Pacifique, on établit le parc Jos-Montferrand en 1960. Près de la rue Joliette, le parc Edmond-Hamelin est ouvert en 1978. Le parc Morgan est aménagé depuis 1929 à l’extrémité de l’avenue du même nom. À l’emplacement de l’ancien manoir de James Morgan, un kiosque est construit quelques années après l’ouverture du parc.

Cette portion de la voie est durement touchée par la désindustrialisation et le déclin démographique qui affectent l’est montréalais dans le dernier tiers du XXe siècle. En outre, la démolition dans les années 1970 de centaines de logements pour élargir la rue Notre-Dame aggrave la situation. De nombreux magasins ferment leurs portes et la rue prend les allures d’une zone dévastée dont la relance s’annonce laborieuse.

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