De la rue McGill à l'autoroute 15
De son ouverture au XVIIe siècle, jusqu'aux années 1850, la route demeure un
chemin de campagne. Voie importante, car une des seules à desservir le sud-ouest
de l'île, elle traverse le quartier Sainte-Anne, le Village de Saint-Gabriel
(1874-1887), puis poursuit sa route jusqu'à Lachine. À la sortie du quartier
Sainte-Anne, la rue Wellington reprend le nom de chemin de Lachine en bas (Lower
Lachine Road). À partir de 1840, ce dernier est
régi par la Commission des chemins à barrières (Montreal Turnpike Trust). La
Ville de Montréal en 1891, puis le Village de Verdun en 1898, en reprennent la
gestion sur leur territoire respectif.
Plusieurs grandes propriétés bordent la voie parmi lesquelles le domaine
Saint-Gabriel, appartenant aux Messieurs de Saint-Sulpice, longtemps seigneurs
de l'île de Montréal, dont les terrains sont vendus à partir de 1860. Il y a
aussi les terres de la Congrégation de Notre-Dame dont la fondatrice, Marguerite
Bourgeoys, obtient de M. de Maisonneuve une concession à la pointe Saint-Charles
dès 1662. En 1668, elle achète la propriété de François LeBer pour y accueillir
les Filles du roi. D'abord nommée Providence par sa fondatrice, la maison prend
ensuite le nom de Maison Saint-Gabriel, en l'honneur des nombreux services
rendus à la Congrégation par les Messieurs de Saint-Sulpice. Classée monument
historique, elle devient un musée en 1966. C'est d'ailleurs un des derniers
témoins de la vocation agricole de ce secteur, car dès la deuxième moitié du
XIXe siècle, l'industrie y prédomine.
L'installation des ateliers de la compagnie du Grand Tronc dans
Pointe-Saint-Charles, en 1856, inaugure la fonction industrielle du secteur. Au
début des années 1880, l'entreprise y emploie plus de 1500 ouvriers oeuvrant à
la construction de locomotives et de wagons. L'espace disponible, mais aussi la
présence d'infrastructures permettant le transport des marchandises comme le
port, le canal de Lachine (1825) et le pont Victoria (1860) attirent usines et
entrepôts. Le long de la rue, les installations de Montreal Warehousing bordent
les bassins numéros 3 et 4 tandis que le bassin Wellington sert au
transbordement des navires océaniques. De plus, le canal de Lachine devient un
pôle d'implantation industrielle. Tout au long du XIXe et dans la première
moitié du XXe siècle, il règne une activité soutenue autour de ce segment de la
rue.
La diminution du nombre de terrains disponibles dès le début du XXe siècle
et, surtout, l'ouverture de la Voie maritime du Saint-Laurent en 1959,
entraînent le déclin de la fonction industrielle de cette partie de la ville.
Avec la désindustrialisation
graduelle, plusieurs bâtiments sont abandonnés ou rasés pour laisser place à des
stationnements. De plus, la construction de l'autoroute Bonaventure, visant à
offrir un meilleur accès au centre-ville de Montréal à l'occasion de
l'Exposition universelle de 1967, isole le secteur de Pointe-Saint-Charles. À
partir des années 1990, des projets de revitalisation de cette zone sont
entrepris. À l'est de l'autoroute Bonaventure, celui de la Cité du Multimédia
entraîne la restauration et la construction de bâtiments voués au développement
du secteur des hautes technologies.
Jusqu'au premier quart du XIXe siècle, le chemin qui devient la rue
Wellington est entouré de terres agricoles. La population y est dispersée et peu
nombreuse. Le creusage du canal de Lachine, l'installation des ateliers du Grand
Tronc et la construction du pont Victoria attirent un nombre important
d'ouvriers et de manoeuvres. Au XIXe siècle, les Irlandais, formant 35% de la
population, constituent la communauté la plus importante. Un des lieux de
rassemblement, l'église Sainte-Anne (1854-1970), borde la rue. Plusieurs
activités comme des concerts, des processions et le célèbre défilé de la
Saint-Patrick, sont organisées et permettent aux Irlandais de se construire un
milieu de vie rappelant leur société d'origine. Dans les années 1980, les
francophones constituent plus de la moitié des habitants de ce secteur, mais la
présence irlandaise reste importante.
Tout au long du XIXe et dans la première moitié du XXe siècle, les ouvriers
qui travaillent dans les nombreuses usines comprises dans la zone du canal de
Lachine résident dans des logements à deux ou trois étages, en brique, dont
plusieurs ont des magasins au rez-de-chaussée. Il y a aussi des maisons
unifamiliales avec des façades travaillées et quelques maisons jumelées dans
lesquelles habite l'élite locale. Au début du XXIe siècle, sauf pour les tours
d'habitation très modernes de la Cité du Multimédia, le parc de logements le
long de la rue Wellington est constitué en majorité de maisons anciennes.
Dès 1892, une ligne de tramway emprunte la rue Wellington en provenance de la
rue McGill. La voie demeure un axe important pour le transport en commun au
début du XXIe siècle et plusieurs lignes d'autobus, dont la principale est la
ligne 61, desservent la rue Wellington. Au fil des ans, des infrastructures
permettent de franchir le canal de Lachine qui coupe la rue. Un tunnel est creusé en 1933 pour
circuler sous le canal et est remplacé par un pont, en 1995. Dans la deuxième
moitié du XIXe et au début du XXe siècle, des voies ferrées empruntent la rue
Wellington à la hauteur de la rue Brennan. Elles bifurquent ensuite pour
enjamber un pont ferroviaire au dessus du canal, juste au sud de la rue. Un
premier pont pivotant est construit en 1912. Il n'est plus en activité depuis
1966, mais constitue un des derniers ponts de ce type sur le canal de Lachine.
Quant au pont-levis CN-Wellington, il est érigé entre 1940 et
1941.