Le chemin principal du village de Sault-au-Récollet

Le Sault-au-Récollet est, au 18e siècle, une petite enclave isolée sur le bord de la rivière des Prairies. Ce village, qui s’est formé autour de l’ancien fort Lorette (vers 1696) puis de l’église paroissiale de la Visitation (1752), joue le rôle d’un centre de service pour les campagnes environnantes, avec le regroupement des activités religieuses, professionnelles et commerciales. Les cultivateurs viennent y moudre leur grain ou carder la laine aux moulins situés à l’est du noyau paroissial, entre l’île de la Visitation et la rue du Pont. Le village se développe peu à peu et, en 1781, on y dénombre 18 maisons. Les activités commerciales se diversifient au cours du XIX^e siècle avec notamment la construction d’un pressoir à cidre et d’une tannerie.

Depuis la naissance du village de Sault-au-Récollet, le chemin principal est au cœur de ses activités, accueillant la plupart des bâtiments importants. Il a bien évolué depuis son ouverture, au tout début du 18e siècle, alors qu’il n’était qu’une petite route de terre reliant quelques maisons de ferme. En 1896, l’inauguration du circuit de tramway qui relie Montréal à Sault-au-Récollet en passant dans l’emprise de l’actuel boulevard Henri-Bourassa amène des citadins et de nombreux villégiateurs dans le secteur. Ils viennent pour un pique-nique à la campagne ou pour s’y installer durant toute la belle saison. La présence de ces nouveaux arrivants contribue à développer le village, jusqu’alors rural, en stimulant l’activité commerciale et en augmentant la demande de produits agricoles tels que la viande, les produits maraîchers et les produits laitiers. On trouve de plus en plus de constructions le long du chemin principal. De nouvelles villas d’été y côtoient désormais le couvent du Sacré-Cœur, l’église paroissiale, le magasin général, les quelques anciennes maisons de ferme et les maisons villageoises.

En 1910, on entreprend la modernisation du chemin principal macadamisé en 1893 et on le renomme boulevard Gouin. On y aménage un système d’égout et d’aqueduc et la voie est élargie d’un bout à l’autre du village, puis pavée. Toutefois, ces travaux sont temporairement interrompus en raison d’une inondation, comme cela arrive parfois au printemps avec la fonte des glaces et la hausse du niveau de la rivière. En 1914, les trottoirs en bois datant de 1890 sont remplacés par des trottoirs d’asphalte. La même année, une fontaine (aujourd’hui disparue) est installée au centre de la voie, à l’angle de la rue de Martigny. De plus, l’électricité éclaire les rues et progressivement les maisons du village. Cependant, ces nouveautés représentent de trop lourdes dépenses pour la petite municipalité et entraînent son annexion à la Ville de Montréal en 1916.

La vocation agricole du secteur disparaît graduellement au fil de l’urbanisation du territoire; notamment, les moulins cessent leurs activités en 1960, si bien qu’au milieu du 20e siècle, cette fonction a complètement disparu. Des rues sont ouvertes perpendiculairement au boulevard Gouin alors qu’en bordure du chemin ancien, des résidences se bâtissent, principalement durant les années 1950 et 1960. Plus au sud, le tracé de la voie de tramway sert à l’aménagement du boulevard Henri-Bourassa. En 1969, la construction du pont Papineau-Leblanc et de ses approches, qui passent sous le boulevard Gouin, amène le réaménagement de cette section du boulevard et sépare le complexe religieux de l’ancien village de Sault-au-Récollet. Malgré ces changements profonds, l’étroitesse et la sinuosité du boulevard Gouin lui confèrent toujours les aspects d’un chemin villageois bordé de plusieurs maisons patrimoniales entre lesquelles trônent des arbres majestueux.

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