Du boulevard Crémazie à la rue Chabanel
Cette section, la dernière ouverte, a porté différents toponymes et n’a
vraiment rien de commun avec les précédentes. Lorsqu’elle est cédée à la Ville
en 1923, la partie entre le boulevard Crémazie et le nord de la rue Prideaux
(devenue Sauvé) porte le nom de rue Verville, changé pour rue Renty en 1927 puis
Park Avenue en 1929. Elle le perd brièvement lorsqu’en 1955, les autorités
municipales la rebaptisent rue Tanguay entre le boulevard Crémazie et la rue
Chabanel. En 1960, elle retrouve le nom de Park Avenue, francisé l’année
suivante. La section au nord de la rue Chabanel conserve le nom de rue
Verville. Comme toutes les rues voisines, la voie s’interrompt à la rue
Chabanel. Entre cette rue et la voie ferrée du Canadien National, au nord, et
celle du Canadien Pacifique, à l’ouest, s’étend un vaste terrain donnant sur le
boulevard Saint-Laurent et sur lequel, en 1942, le Gouvernement fédéral installe
un important complexe d’usines de munitions fonctionnant 24 heures par jour et
qui emploie jusqu’à 9 000 ouvriers. Après la guerre, il sera remplacé, dans la
partie nord, par des manufactures diverses et, dans la partie sud, par la Cité
de la mode, construite dans les années 1960.
Dans ce segment de l’avenue du Parc, les premières constructions sont
présentes au tout début des années trente, mais les terrains sont surtout
développés après la Deuxième Guerre mondiale. On y trouve d’abord uniquement des
résidences.
Au début, la population se partage à peu près également entre francophones et
anglophones, mais à partir des années 1950, un nombre important de Montréalais
d’origine italienne s’y installe. Par la suite, la composition ethnoculturelle
se diversifie, notamment avec l’arrivée de Latino-Américains.
Rapidement, le développement industriel repousse la fonction résidentielle,
qui se concentre du côté est, au nord de la rue Legendre, dans les maisons
d’appartements de deux ou trois étages. Un grand nombre d’entreprises de
distribution, d’entrepôts et de manufactures diverses s’installent dans des
bâtiments dont la hauteur varie de un à six étages. De plus, la zone
manufacturière de confection, la Cité de la mode, polarisée par la rue Chabanel,
y déborde quelque peu.
Dans ce secteur, la rue est parallèle à la voie ferrée du CP (ligne
Blainville-Saint-Jérôme). La construction du boulevard Métropolitain, ou
autoroute 40 (1963), a aussi un impact important sur le paysage de la voie et
contribue à faire de ce segment une enclave. Ainsi, il est en rupture avec le
reste de la rue, tant physiquement que par son caractère industriel marqué.
L’avenue du Parc est une importante artère de communication nord-sud et
constitue, avec le chemin de la Côte-des-Neiges, une des principales voies
d’accès au parc du Mont-Royal. D’ailleurs, Frederic Law Olmsted a voulu en faire
l’entrée principale en y faisant commencer son chemin carrossable.
Reconnue aussi pour ses immeubles d’appartements d’une grande qualité
architecturale, elle est un lieu de mémoire important pour les communautés
anglo-écossaise, juive et grecque. Elle est, comme le décrit si bien
l’écrivain juif montréalais Mordecai Richler (1931-2001), la rue de la classe
moyenne juive : « les Juifs ni riches ni pauvres hantaient habituellement
l’avenue du Parc – les plus audacieux se risquaient sur le Chemin de la
Reine Marie. Les pauvres et les vieux s’en tenaient, pour leur part, au
boulevard Saint-Laurent. » (Mordecai
Richler, Mon père, ce héros..., trad. de l’anglais par Jean Simard,
Montréal, Cercle du livre de France, 1975, p. 23.)
Marquée en sa partie sud par une grande opération de redéveloppement urbain,
elle est, dans le Mile-End, une rue commerciale de quartier à l’image de sa
population diversifiée. Quant au petit segment au nord du boulevard Crémazie, il
est sans relation avec le reste de la voie. L’ensemble des Montréalais manifeste
son attachement à l’avenue du Parc, comme en fait foi l’importante mobilisation
en 2006-2007 contre le projet de changement de nom de l’artère.