Intersection des rues Saint-Denis et Beaubien [détail] - 1955
La rue St-Denis et ses intersections

De la rue Saint-Antoine à la rue Sherbrooke

Une première partie de la rue Saint-Denis, tracée à partir de 1818, traverse le marché Viger (devenu square Viger en 1860) et atteint

Le square Viger en 1915 (détail), Insurance Plan of the City of Montreal. Volume III.

la rue Sainte-Catherine, après l’acquisition de terrains appartenant à Louis-Joseph Papineau et à sa tante Perrine-Charles Cherrier, veuve de Denis Viger. En 1826, la voie atteint la rue Sherbrooke.

La croissance s’effectue d’abord lentement. En 1825, au moment de l’inauguration de la cathédrale Saint-Jacques (située à l’angle nord-est de la rue Sainte-Catherine), des notables reprochent à l’évêque de l’avoir fait construire à la campagne. En 1846, du côté ouest, il y a des habitations jusqu’à la rue Mignonne (boulevard De Maisonneuve) et en 1872, jusqu’à la rue Ontario. Du côté est,L’église Saint-Jacques avant sa démolition, 1963. seule la cathédrale existe, le reste comprenant surtout des vergers et des terres en friche. Vers 1890, tous les terrains y sont lotis, mais au-delà de la rue Ontario, en remontant la côte à Baron, seuls quelques lots du côté ouest sont bâtis. En 1907, les deux côtés de la rue sont construits jusqu’à la rue Sherbrooke. La chaussée est macadamisée vers 1880 et le pavage en asphalte complété durant les années 1890. Entre 1845 et 1921, cette partie de la rue Saint-Denis constitue la limite entre les anciens quartiers Saint-Louis et Saint-Jacques. Elle se retrouve dans l’arrondissement de Ville-Marie.

La conflagration de 1852, qui détruit 1 200 bâtiments et jette 10 000 personnes sur le pavé, a un effet considérable puisque tous les bâtiments de la rue disparaissent. L’événement déclenche un véritable redéveloppement du quartier, stimulé par un nouveau règlement Vue aérienne du chantier de l’UQAM avec la chapelle Notre-Dame de Lourdes, 1977. municipal qui interdit la construction d’immeubles à parements de bois. Le long de la rue Saint-Denis, on reconstruit surtout des maisons unifamiliales en rangée, avec façade en pierre. Avec les rues Berri et Saint-Hubert, la rue Saint-Denis forme le cœur du nouvel espace bourgeois francophone dont le square Viger est le principal lieu de sociabilité. En outre, une petite communauté anglicane, liée à la garnison britannique, s’implante et construit l’église Holy Trinity,L’hôpital Saint-Luc, rue Saint-Denis en 1936. ouverte en 1865, à l’angle de la rue Dubord  (devenue Viger). En 1922, les fidèles de rite catholique melkite en font l’église Saint-Sauveur, jusqu’à sa fermeture en 1995. Plus haut, l’église Saint-Jacques reconstruite (1857) devient le pivot d’un noyau institutionnel religieux important avec, à proximité, les divers établissements des Sœurs de la Providence, l’École de réforme des Frères de la Charité, ainsi que la chapelle de Notre-Dame de Lourdes (1876). L’église perd toutefois son statut de cathédrale, l’évêque décidant de s’installer dans l’ouest de la ville. Elle est démolie en 1975-1979 et des éléments architecturaux sont intégrés au pavillon Judith-Jasmin de l’UQÀM. Plus au sud, un premier établissement de l’Hôpital Saint-Luc est aménagé en 1908 .

Un pôle universitaire important se déploie avec l’arrivée en 1895 de l’Université de Montréal, au sud-est de la rue Sainte-Catherine, puis de l’École Polytechnique (1905-1958) face à l’église Saint-Jacques et, à proximité,La Bibliothèque Saint-Sulpice, rue Saint-Denis, 1936. de l’École des Hautes Études Commerciales (1910-1968). La concentration d’établissements d’enseignement supérieur explique d’ailleurs l’appellation de Quartier Latin donnée à ce secteur. La vocation culturelle est renforcée par l’ouverture de la bibliothèque Saint-Sulpice en 1915, du théâtre Saint-Denis en 1916, de même que par la présence de nombreuses librairies .

Au tournant du XXe siècle, le caractère bourgeois de ce quartier attire de nombreuses boutiques qui lui donnent graduellement une fonction commerciale. À l’angle de la rue Sainte-Catherine, l’immeuble Dandurand (1912) témoigne du projet de stimuler la croissance d’un nouveau pôle du centre-ville dans l’est.

Le quartier se transforme après la Première Guerre mondiale. La bourgeoisie canadienne-française le quitte graduellement pour s’installer surtout à Outremont et l’Université de Montréal construit à partir de 1928 son nouvel immeuble surPavillon de l'UQAM, 2005 par Denis Labine. le flanc nord du mont Royal, tout en continuant à occuper son bâtiment de la rue Saint-Denis jusqu’en 1942. Durant une cinquantaine d’années, la composition sociale de la population change et les anciennes maisons bourgeoises sont converties en maisons de chambres. Toutefois, l’arrivée de l’Université du Québec à Montréal en 1979, et un peu avant, du Cégep du Vieux-Montréal à proximité, entraînent le retour de l’enseignement supérieur sur la rue Saint-Denis, renforcé par l’ouverture, rue Berri, de la Grande Bibliothèque du Québec en 2005.

Les fonctions de ce segment évoluent au fil du temps. En plus des usages institutionnels et résidentiels, la dimension commerciale de la  rue s’accentue durant la deuxième moitié du XXe siècle. Ainsi, les bâtiments logent surtout des restaurants et des boutiques au rez-de-chaussée et des habitations aux étages supérieurs. Habitations et commerces, rue Saint-Denis au nord de la rue Roy, 1975. Cette transformation de la rue et la multiplication des terrasses en font une destination touristique majeure l’été. La station Berri-UQÀM (1966), dont l’une des sorties donne sur la rue Saint-Denis, est un des carrefours importants du réseau souterrain montréalais, au croisement de trois lignes de métro.

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