Rue Saint-Laurent
Le boulevard Saint-Laurent et ses intersections

De la rue Sherbrooke à la rue Bernard

Ce segment est remarquable par sa diversité ethnique et la polyvalence de ses fonctions. Entre 1920 et 1960, il est l’axe du quartier juif, tout en traversant deux noyaux canadiens-français et catholiques, celui de Saint-Jean-Baptiste et celui qui est polarisé par l’église Saint-Enfant Jésus du Mile-End. Après la Seconde Guerre mondiale, il accueille d’autres groupes d’immigrants, dont les Grecs et les Portugais. Comme pour le précédent tronçon, la voie est ouverte en 1717, comme chemin rural menant à la paroisse de Saint-Laurent. Elle est municipalisée en 1796, jusqu’aux limites de la ville (alors un peu au nord de la future rue Napoléon).

La voie est relativement bien entretenue à cause de son rôle d’artère de communication nord-sud. Elle est macadamisée dès 1832 pour la portion montréalaise, puis en 1840, l’autre portion est prise en charge par la Commission des chemins à barrière, qui en assure l’entretien. Devant l’état lamentable des routes qui mènent à la ville, le gouvernement de l’époque crée la Commission des chemins à barrière, mieux connue sous son nom anglais de Montreal Turnpike Trust, qui existe jusqu’en 1922. Elle refait à neuf les 7 grands chemins qui mènent à la ville dès le début des années 1840 et impose un péage pour amortir les coûts de construction et en assurer l’entretien régulier, car la Commission doit s’autofinancer. Cependant, les municipalités qui veulent permettre l’accès gratuit à leurs résidants peuvent obtenir l’abolition du péage en versant à la Commission un paiement annuel. Éventuellement, elles prendront sous leur responsabilité l’entretien même de la voie.

Une barrière à péage est en service, d’abord à la hauteur du chemin des Tanneries (avenue du Mont-Royal) vers 1845, puis est déplacée et installée au nord de la rue Saint-Louis (devenue l’avenue Laurier) vers 1870. Elle sera éventuellement repoussée encore plus loin. Le chemin de Saint-Laurent est alors connu également sous le nom de chemin du Sault-au-Récollet. Il est le plus achalandé du réseau car, à la hauteur de l’avenue du Mont-Royal, outre la circulation en provenance de la côte Saint-Laurent, il reçoit le trafic de deux autres chemins : à l’est, celui des Tanneries qui mène aux carrières et, à l’ouest, celui de la côte Sainte-Catherine, qui mène vers la côte des Neiges et aussi la côte Saint-Laurent.

Le tronçon traverse le faubourg Saint-Laurent, puis, à compter de 1831, marque la séparation entre les quartiers Saint-Laurent et Saint-Louis. Au-delà des limites de la ville, la voie traverse la partie rurale de la paroisse de Montréal, qui se subdivise en municipalités de banlieue après 1845. De 1846 à 1861, elle traverse la côte Saint-Louis, dont le vaste territoire est ensuite morcelé. Dans sa partie sud jusqu’à l’avenue du Mont-Royal, la rue Saint-Laurent traverse le village de Saint-Jean-Baptiste (1861), annexé à Montréal en 1886 et devenu le quartier Saint-Jean-Baptiste. Entre l’avenue du Mont-Royal et l’avenue De Castelnau, elle forme l’axe principal du village de Saint-Louis du Mile End (1878), devenu Ville de Saint-Louis (1895), puis annexé en 1909 sous le nom de quartier Laurier. En 2001, ce segment traverse l’arrondissement du Plateau-Mont-Royal.

Comme elle l’avait été plus au sud, la voie est élargie graduellement jusqu’à l’avenue Van Horne, entre 1895 et 1922, surtout du côté ouest. En 1951, une petite partie, entre les rues Sherbrooke et Milton, est élargie de nouveau du côté ouest.

Durant la deuxième moitié du XIXe siècle, outre son rôle de voie de communication vers l’intérieur de l’île, elle demeure la rue principale des quartiers qu’elle traverse. Les constructions progressent graduellement au nord de la rue Sherbrooke à partir des années 1870 et, en 1907, les deux côtés de la voie sont construits jusqu’à la rue Saint-Viateur. En 1939, les constructions atteignent l’avenue Van Horne.

Au coin nord ouest de la rue Sherbrooke, s’élève en 1818 la maison du marchand John Torrance, achetée par John Molson en 1825. Celui-ci la rebaptise Belmont Hall et la famille en sera propriétaire jusqu’en 1910. En 1913, elle est transformée en garage et est détruite par un incendie en 1937. Une station-service y est construite par la suite. L’église Chalmers Presbyterian occupe un certain temps un terrain près de la rue Prince-Arthur. Plus haut sur la voie, les Jardins Guilbault, attraction et lieu de sociabilité bien connu des Montréalais depuis 1831, s’installent en 1862 sur un terrain qui chevauche l’avenue des Pins. L’entreprise ferme pour de bon en 1869 et la rue Guilbault en rappelle le souvenir. Sur l’emplacement, un ambitieux projet immobilier, le Baxter Block, est réalisé en 1892. Ensemble monumental, il se présente comme une rangée de 28 magasins qui partagent une façade unifiée, de style néo-roman, rythmée par des pilastres entre chacun et par des fenêtres cintrées au premier étage. Des logements et des ateliers de confection occupent les étages supérieurs. Le projet d’y adjoindre une salle de spectacle ne sera jamais réalisé.

Au nord de la rue Napoléon, le village de Saint-Jean-Baptiste se développe rapidement à partir de 1861 autour de deux axes principaux : la rue Rachel et le boulevard Saint-Laurent. La première église est construite en 1873, rue Rachel, entre les rues Henri-Julien et Drolet; elle polarise aussi les institutions du noyau paroissial. Le village est habité par des artisans et des journaliers, dont plusieurs travaillent dans la construction. L’ouverture du marché Saint-Jean-Baptiste en 1870, le deuxième ouvert rue Saint-Laurent, indique la présence d’un bassin de population suffisant. Il attire quelques hôtels et, en 1879, on en compte cinq entre la rue Marie-Anne et l’avenue du Mont-Royal. Saint-Jean-Baptiste n’a pas les mêmes exigences que Montréal et les constructions sont d’abord surtout en bois. En 1879, un incendie désastreux, qui détruit une vingtaine de maisons de la rue, entraîne l’harmonisation de la réglementation des constructions avec celle de Montréal.

Au nord de l’avenue du Mont-Royal, le territoire de Saint-Enfant-Jésus du Mile End se développe à partir de la fin des années 1850. Au début, il est habité par des ouvriers et des journaliers, travaillant notamment dans les carrières. L’évêque Ignace Bourget y fait bâtir une église en 1857, rue Saint-Dominique, entre le boulevard Saint-Joseph et la rue Laurier actuels. Devant l’édifice, on crée en 1875 le parc Lahaie, qui prolonge son parvis et fait le lien avec la rue Saint-Laurent. Bientôt d’autres institutions s’implantent aux alentours. Sur le flanc nord de l’église, l’Institut catholique des Sourds-Muets s’installe dans les années 1850 et déménage plus haut sur le boulevard Saint-Laurent dans les années 1920. Les sœurs Franciscaines missionnaires de Marie construisent par la suite un nouveau couvent sur cet emplacement. De l’autre côté de l’église, au coin du boulevard Saint-Joseph, les Sœurs de la Providence inaugurent leur nouveau pensionnat en 1874. En 1901, l’église est transformée et reçoit sa façade actuelle, œuvre de l’architecte Joseph Venne.

En 1905, Ville de Saint-Louis (1895) fait construire son nouvel hôtel de ville à l’angle nord-ouest de l’avenue Laurier. Le bâtiment reprend le style château mis en vogue par les hôtels du Canadien Pacifique. Après l’annexion à Montréal, en 1909, il sert longtemps de poste de pompier et de police. À la fin du XXe siècle, le déménagement des policiers permet de consacrer une partie des locaux au musée des pompiers. En face, de l’autre côté du boulevard, une succursale de la Banque d’Hochelaga, devenue la Banque Canadienne nationale et 1924, puis la Banque Nationale du Canada en 1979, occupe pendant plusieurs décennies l’angle nord-est de la rue Laurier dans un immeuble construit en 1915. À l’angle sud-ouest, s’élève depuis 1899 l’immeuble de l’ancienne Banque des Marchands, intégrée à la Banque de Montréal en 1922. Au sud, face à l’église, un bureau de poste (1907-1972) et des magasins complètent l’offre de services du quartier. Avec le complexe religieux, ces immeubles regroupés autour de la place centrale forment un remarquable noyau villageois.

Au XXe siècle, le segment entre la rue Sherbrooke et l’avenue Van Horne devient un axe manufacturier et commercial majeur et, de 1920 à 1960, la rue principale du quartier juif montréalais. Au XXIe siècle, il forme l’un des hauts lieux des nouvelles technologies des communications et du Montréal branché.

La diversité de la population est remarquable. Vers 1870, celle-ci est divisée entre francophones et anglophones, les premiers étant majoritaires au nord de la rue Guilbault, les seconds au sud. Toutefois, en 1920, l’émergence du nouveau quartier juif est manifeste, et entre la rue Roy et l’avenue du Mont-Royal, les patronymes à consonance d’Europe de l’Est dominent. À partir de la rue Villeneuve, on retrouve des francophones en grand nombre, mais une fois passés l’avenue Laurier et le noyau paroissial de Saint-Enfant Jésus du Mile End, la population juive reprend de l’importance jusqu’à la rue Bernard. Par ailleurs, la voie est davantage résidentielle au nord de l’avenue du Mont-Royal, qu’au sud car, en 1940, seulement le quart des adresses y correspond à un magasin, un service ou une manufacture.

La rue des manufactures

Comme dans le segment précédent, la confection est le moteur économique de la voie au XXe siècle. Les ateliers s’installent sur toute la longueur, utilisant des édifices de toutes tailles. Dès 1903, la maison John W. Peck, attirée par des exemptions d’impôt foncier dans Ville de Saint-Louis, construit sa manufacture au coin de la rue Saint-Viateur. Après la disparition de cette société, vers la fin les années 1920, l’édifice continue à loger des entreprises de confection. Quelques immeubles en hauteur ponctuent la voie : le Vineberg, construit en 1912 au coin de l’avenue Duluth, le Balfour, édifié en 1929 au coin de la rue Prince-Arthur, et le Cooper, de style art déco, construit en 1932 entre la rue Napoléon et l’avenue Duluth. Des ateliers s’y installent, mais tout autre espace qui peut servir est utilisé. Ainsi, les étages supérieurs du Baxter Block sont tristement célèbres à cause de l’incendie du 11 mars 1942, dans l’atelier de Manhattan Cap, qui fait trois victimes parmi les couturières. Toutefois, avec le temps, les entrepreneurs recherchent davantage des bâtiments plus grands, qui leur permettent de faire des économies d’échelle. C’est ainsi que la confection continue à migrer durant la seconde moitié du XXe siècle, vers les immeubles à grand gabarit, d’abord ceux construits sur le site de l’ancienne gare de triage Saint-Louis (entre les rues De Gaspé et Henri-Julien au nord de l’avenue Laurier), ensuite ceux de la rue Chabanel.

La rue principale du quartier juif montréalais

La construction de la synagogue Shaare Tfile, rue Milton, entre la rue Clark et le boulevard Saint-Laurent, en 1900, préfigure l’essor du quartier juif, puis sa transformation en cinéma (Élysée), vers 1959, en marque le déclin. En 1929, près de 80% des membres de la communauté juive habitent déjà au nord de la rue Sherbrooke, entre les rues Hutchison et De Bullion. Avec le temps, la migration continue plus au nord, au-delà de l’avenue du Mont-Royal. Des institutions comme le YMHA (1929) et la Bibliothèque publique juive (1949) choisissent de s’installer sur cette voie perpendiculaire, mais le boulevard Saint-Laurent demeure la rue principale du quartier, abritant les magasins, les restaurants, les services et quelques institutions de la communauté. Comme l’écrit Mordecai Richler, «La plupart des Juifs qui vivent sur les franges du ghetto — des rues nommées Saint-Urbain, Saint-Dominique, Rachel et Hôtel-de-Ville — travaillent dans les filatures ou les manufactures de vêtements. Les uns sont orthodoxes, d’autres communisants. Mais tous font leurs achats, leurs dévotions, leurs contestations et une bonne part de leurs jeux érotiques sur le boulevard Saint-Laurent, qui est l’aorte du ghetto...» [Mon père ce héros, traduction de Jean Simard, Montréal, Cercle du livre de France, 1975 : 19].

Les entreprises du boulevard Saint-Laurent répondent à tous les besoins de la communauté, depuis les nombreux magasins de fruits et de légumes, les épiciers, les marchands de volaille et de poisson, qui alignent leurs vitrines bariolées entre les avenues des Pins et du Mont-Royal, jusqu’aux ateliers de monuments funéraires Berson, ouverts en 1922. Si la maison Schwartz (1928) attire toujours les amateurs de «smoked meat» qui font la file à l’extérieur à certaines heures, il fut un temps où on ne comptait pas moins de neuf « delicatessen » dans les environs. De la même façon, le restaurant Moishe, spécialiste bien connu des grillades de bœuf, est à ses débuts (1937) un restaurant de quartier parmi d’autres. Certaines maisons deviennent célèbres, comme l’épicerie ouverte en 1917 par Ida Steinberg, immigrante pauvre venue de Hongrie, entre la rue Marie-Anne et l’avenue du Mont-Royal. Elle est le point de départ du réseau des supermarchés Steinberg (1930-1992). Mentionnons aussi l’aventure de Leah et Louis Florkevitz, qui installent en 1935 une petite boutique de fruits et légumes, Warshaw, devenue avec le temps un supermarché (fermé en 2002).

Avant 1960, les marchandises offertes sur le boulevard sont d’abord et avant tout bon marché, ce qui attire aussi la clientèle des quartiers ouvriers voisins. Mordecai Richler précise : «À longueur de journée, le boulevard Saint-Laurent — la Main — grouille de Juifs besogneux qui font là leurs provisions, et achètent aussi des meubles, des vêtements et des viandes. Les murs, les palissades sont placardés d’affiches électorales défraîchies, en yiddish, en français, en anglais. La rue empeste l’ail, la chicane, les encaisseurs de créances. On entasse en désordre, dans les ruelles, les boîtes à oranges bourrées de déchets et de fruits avariés. [...] Les marchands ne fignolent guère leurs vitrines : les produits s’y amoncellent en vrac, les vitres sont chamarrées d’écriteaux signalant les " prix réduits " et les " soldes "...» [Mon père ce héros, traduction de Jean Simard, Montréal, Cercle du livre de France, 1975 : 20].

Grâce au travail de l’échevin Joseph Schubert (1889-1952), qui représente le quartier à l’hôtel de ville, le bain public qui porte son nom ouvre en 1932 à l’angle de la rue Bagg. Il apporte au quartier, plutôt mal équipé en termes sanitaires, une institution indispensable.

Avant la Deuxième Guerre mondiale, la « lingua franca » du quartier est le yiddish, la langue des immigrants arrivés entre 1890 et 1930. Le premier journal yiddish du Canada, le Keneder Odler, fondé en 1907 par Hirsh Wolofsky et qui disparaît à la fin des années 1980, a ses bureaux sur le boulevard à la hauteur de l’avenue Duluth. De nombreux spectacles sont donnés en yiddish et le cinéma n’est pas en reste. Tout près, le Globe, construit en 1914, devient le cinéma Hollywood en 1927 et, durant les années 1920 et 1930, maintient une programmation en yiddish. Après la guerre, le yiddish perd du terrain, l’Holocauste ayant presque anéanti la population juive yiddishophone d’Europe de l’Est et les jeunes l’ayant abandonné au profit de l’anglais.

Les activités syndicales et politiques prennent aussi place sur le boulevard. Les travailleurs juifs apportent avec eux leur tradition de militantisme et forment le noyau des premiers groupes socialistes montréalais. D’ailleurs, le seul député communiste du Canada, Fred Rose, est élu en 1943 par la population de la circonscription de Montréal-Cartier qui englobe la voie. Les premiers ouvriers à créer des syndicats sont les tailleurs, moins nombreux et dont la fonction est stratégique, car ce sont eux qui travaillent la matière première pour ensuite la donner aux couturières. Ces dernières sont plus difficiles à syndiquer, mais ce sera chose faite durant les années 1930. Les fêtes du Travail et celle du Premier mai donnent lieu à des défilés qui empruntent une partie de la voie. En même temps, des associations culturelles ouvrières voient le jour comme le Workmen’s Circle, destiné aux travailleurs juifs. Il occupe son propre édifice, construit dans le style art déco en 1935, près du boulevard Saint-Joseph.

Quelques synagogues sont installées dans des boutiques du boulevard, mais les plus importantes choisissent plutôt de s’établir sur les rues limitrophes. En outre, le marché Saint-Jean-Baptiste est utilisé, durant les années 1920, pour les grandes fêtes juives. Rénové en 1933, il sert de point de ralliement de la communauté avant sa fermeture en 1956. Il est démoli en 1966 et le parc des Amériques en occupe le terrain. Dans l’après-guerre, les Juifs montréalais commencent à migrer vers l’ouest, d’abord vers Outremont, Côte-des-Neiges et Snowdon, puis vers Hampstead et Côte-Saint-Luc. L’axe du boulevard Saint-Laurent se vide peu à peu de sa population juive. Il subsiste peu de traces de cette grande époque de l’histoire de la communauté.

Les Grecs et les Portugais.

Le boulevard Saint-Laurent continue néanmoins de jouer le rôle de couloir d’immigration. Deux groupes en particulier y laissent leur empreinte : les Grecs durant les années 1950 et les Portugais à partir des années 1960. Parallèlement, la voie attire des magasins associés à d’autres groupes ethniques. Ainsi, on en trouve qui vendent des produits de Pologne, d’Allemagne ou de Slovaquie, accentuant ainsi le caractère cosmopolite du boulevard. À la fin des années 1950, la communauté portugaise commence à s’installer dans l’axe de la voie, entre les rues Prince-Arthur et Marie-Anne et ses membres entreprennent de rénover les vieilles maisons des rues environnantes, multipliant les façades multicolores et les restaurants. Le noyau paroissial de la mission Santa Cruz, fondée en 1963, devient le pôle de sociabilité du quartier. Une nouvelle église est inaugurée en 1986, rue Rachel, et est flanquée d’un centre communautaire. Le parc du Portugal, au coin de la rue Marie-Anne, souligne cet apport.

Le boulevard Saint-Laurent à la fin du XXe siècle et au début du XXIe siècle

Durant les années 1970, la voie a mauvaise réputation; le recul de la confection, la relocalisation des industries ailleurs dans la ville, la migration des populations vers d’autres quartiers entraînent une dégradation certaine. Toutefois, à partir des années 1980, un renouveau se fait sentir alors que les artisans de l’image et du multimédia, commencent à s’y installer, transformant d’anciens ateliers de confection en lofts technologiques et en lofts d’artistes. Au coin de la rue Milton, l’édifice Reitman est ainsi transformé en 1986, et plus haut, le Vineberg, le Balfour et le Cooper reçoivent de nouveaux occupants et changent complètement de vocation. Le complexe Ex-Centris vient confirmer les nouvelles activités du quartier à partir de 1999. De plus, de nombreux restaurants et bars branchés ouvrent leurs portes entre la rue Sherbrooke et l’avenue du Mont-Royal. D’autres immeubles connaissent une nouvelle vie. Le Baxter Block est partiellement restauré et de nouveaux locataires s’installent dans les boutiques, comme la librairie Gallimard (1989) ou, un temps, le cinéma Parallèle. Le cinéma Hollywood devient L’Amour. Au nord de l’avenue du Mont-Royal, la succursale de la Banque de Montréal, construite en 1915, loge un temps l’Hôtel des encans de Montréal. L’ancien édifice du Worker’s Circle est racheté par l’Association culturelle espagnole qui y installe des salles et un restaurant. Presque à côté, l’Espace Go inaugure son nouveau théâtre en 1995, à l’emplacement d’une boulangerie, au sud du boulevard Saint-Joseph. Près de la rue Fairmount, le complexe Lux, ouvert entre 1983 et 1993, témoigne de la revitalisation de la voie et le vieil édifice Peck est lui aussi transformé pour accueillir la maison Ubisoft, qui élabore ses jeux vidéo.

Le tramway hippomobile dessert le segment à compter de 1861, jusqu’à l’avenue du Mont-Royal. L’entreprise installe des écuries vers 1869, du côté ouest de la voie, entre l’avenue Duluth et la rue Rachel. La traction électrique est implantée en 1892 et, l’année suivante, la totalité du segment est desservie. Les voies sont doublées graduellement à compter de 1894. Comme pour le segment précédent, l’autobus remplace le tramway à compter de 1952.

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