Capsules

Les anciennes maisons de ferme, des monuments historiques qui rappellent le passé agricole de l’île

Figure 1. La maison Thomas-Brunet sur le chemin du Cap-Saint-Jacques. Figure 1. La maison Thomas-Brunet sur le chemin du Cap-Saint-Jacques. Source : BPTE, 2008. Agrandir

Ces quatre monuments historiques possèdent plusieurs caractéristiques communes. Situées au bord de routes qui constituent les tracés fondateurs de Montréal, elles témoignent toutes de la vie rurale sur l’île entre le XVIIIe siècle et le milieu du XXe siècle. Caractérisées par une occupation prolongée par des familles d’agriculteurs, elles témoignent également de la donation comme moyen de transmission du patrimoine familial, qui permettait d’éviter la division de la terre entre les héritiers au décès des parents et de faciliter le règlement des successions. La donation était assortie de nombreuses obligations assurant la subsistance et l’hébergement des parents vieillissants. Les actes notariés rattachés à ce mode de transmission des terres sont des sources privilégiées pour nous renseigner sur la production agricole, la consommation des produits alimentaires et les relations familiales qui caractérisaient autrefois la vie rurale au Québec.

Les maisons du cap Saint-Jacques

Avec ses 288 ha, le parc régional du Cap-Saint-Jacques est le plus grand parc régional de Montréal. Le cap Saint-Jacques est une pointe de terre au relief vallonné située à l’extrémité nord-ouest de l’île. La partie ouest de ses rives baigne dans le lac des Deux Montagnes, tandis que sa partie nord-est donne sur la rivière des Prairies, à la hauteur de l’île Bizard. Autrefois, les résidants du cap avaient accès à leur propriété par les voies navigables et par le chemin du bord de l’eau (l’actuel boulevard Gouin).

La topographie du territoire et la composition des sols y permettent le développement agricole dès le début du XVIIIe siècle. Le cap Saint-Jacques est composé de fermes dites « d’autosuffisance », c’est-à-dire basées sur la culture et l’élevage d’animaux pour subvenir aux besoins de la famille, dont témoignent la maison Thomas-Brunet et la maison Jacques-Richer dit Louveteau. Cette occupation agricole se poursuivra malgré l’urbanisation de l’ouest de l’île. Le parc régional du Cap-Saint-Jacques serait un des derniers exemples de l’occupation agricole qui a dominé pendant des siècles sur le territoire montréalais.

La maison Thomas-Brunet et la maison Jacques-Richer-du-Louveteau s’inscrivent donc dans un site exceptionnel, dont l’environnement est demeuré quasi identique à ce qu’il était au XVIIIe siècle, pour ce qui est des vues sur l’eau, de la topographie et des routes.

L’ancienne côte Saint-Louis du Bois-Franc à Saint-Laurent

Figure 2. Extrait. Carte de l’île de Montréal, 1834. André Jobin (1786-1853). Figure 2. Extrait. Carte de l’île de Montréal, 1834. André Jobin (1786-1853). Bibliothèque et Archives nationales du Québec. No 83791. Agrandir

La particularité de ce chemin contribue à la valeur historique de la maison Robert-Bélanger, puisque contrairement aux autres voies desservant les terres des côtes riveraines à la rivière des Prairies, cette côte ne longe pas la rive mais fait un détour à l’intérieur des terres (voir figure à droite), étant reliée au XVIIIe siècle aux chemins des côtes Sainte-Geneviève à l’ouest et du Sault-au-Récollet à l’est par deux montées. Au départ, cette côte n’avait pas lieu d’exister car le seigneur aurait normalement concédé des lots au « beau bois » à partir de la rivière. Certains attribuent cette particularité à la qualité du « beau bois » au nord de la côte du même nom, dont l’emplacement correspond aujourd’hui au bois de Saraguay, un arrondissement naturel classé par le gouvernement du Québec en 1981.

En 1855, la paroisse Saint-Laurent est instaurée en municipalité. En 1893, le centre du territoire de la paroisse obtient le statut de ville, sous le nom de « Ville Saint-Laurent ». Après la Seconde Guerre mondiale, on compte encore une vingtaine de maisons de ferme sur le chemin du Bois-Franc, qui s’est urbanisé de façon intensive au cours des dernières années. La maison Robert-Bélanger est le dernier témoin du passé rural de la côte Saint-Louis du Bois-Franc.

Au bord de la rivière des Prairies
Les premières terres sont concédées par les sulpiciens à l’est de l’île au début des années 1670, afin de décourager les incursions iroquoises et fortifier cette extrémité de l’île. Le terrain sur lequel la maison Bleau est construite figure parmi les premiers octroyés. L’accès au territoire de Rivière-des-Prairies est alors possible par le chemin du Roi qui fait le tour de l’île et par un chemin de traverse qui en relie les rives nord et sud. Rivière-des-Prairies est érigée en municipalité de paroisse en 1845. Éloigné des grands centres, ce secteur conserve sa vocation agricole jusqu’au milieu du XXe siècle. Rivière-des-Prairies est annexée à la ville de Montréal en 1963 et s’urbanise rapidement, favorisée notamment par l’ouverture de l’autoroute 40, qui passe aujourd’hui près de la maison Bleau.

Sources :
Bessière, A. et V. D’Amour. 2008. Étude historique et patrimoniale de la maison Robert, 3900- 3902, chemin Bois-Franc, arrondissement de Saint-Laurent. Rapport présenté au Service de la mise en valeur du territoire et du patrimoine de la ville de Montréal, juillet 2008.

Caron, D. 2008. La maison Thomas-Brunet, 187, chemin du Cap-Saint-Jacques. Bureau du patrimoine, de la toponymie et de l’expertise. Janvier 2008. 101 p.
D’Amour, V. et A. Stewart. 2007. Étude historique et patrimoniale de la maison Bleau, 13 200, boulevard Gouin est. Rapport présenté au Service de la mise en valeur du territoire et du patrimoine de la ville de Montréal, novembre 2007.

D’Amour, V. et A. Stewart. 2007. Étude historique et patrimoniale de la maison Jacques Richer dit Louveteau, 163, chemin du Cap-Saint-Jacques Rapport présenté au Service de la mise en valeur du territoire et du patrimoine de la ville de Montréal, novembre 2007

Ville de Montréal. Grand répertoire du patrimoine bâti (patrimoine.ville.montreal.qc.ca).